Le thé est aux anglais ce que le vin est aux français : une tradition, pour ne pas dire une institution élevée au rang d’art. Quoi de plus normal donc pour un label britannique tel que Static Caravan de proposer un joli carton d’invités pour accompagner l’heure du thé ?
Pour ce faire, divers camarades de la maison ont été mis à contribution, ayant pour consigne de puiser leur inspiration dans les tréfonds de la tasse à boisson infusée.
Comme le laisse présager le thème ici abordé, les instants sonores proposés, si variés soient-ils, s’orientent majoritairement vers le repos, le réconfort et la douceur. Ainsi retrouve-t-on quelques adeptes d’une électronica enneigée, soyeuse et cristalline (le bien-nommé Snow Jewel d’Inch-Time), dotée de fortes couleurs organiques (le Four PM d’Oblong, ses tic-tacs horlogers et son piano primesautier), voire de cordes vocales (l’excellent One liner de Dollboy, qui sonne comme du Robert Wyatt remixé par ISAN). Toujours dans une lignée relaxante, Lord Jim écrit une belle page de nostalgie avec seulement quelques notes piano partiellement retravaillées et des nappes d’orgue crachotant. Plus hypnotique, AM/PM laisse dériver son électronica vers des rythmiques minimal tech en support de nappes et choeurs synthétiques oscillants. Toujours aussi à l’aise dans leur terrain de jeu, Tunng fait dans la folktronica chantée rétro-futuriste, tout comme Max de Wardener qui s’amuse à distiller de timides arpèges cotonneux sur fond d’aménagements bizarroîdes. Au chapitre bizarreries, root70 surprend et dépareille avec son jazz cuivré et swinguant venue d’une autre époque, tandis que Qua réveille à coup de thé glacé et frappé, suivant les traces ludiques de Baikonour ou Minotaur Shock, avec ses rythmiques barrées et ses bidouillages mêlés à des synthés dégoulinants.
Teaism ne censure pas non plus les amateurs d’ambient givrée, fendue de souffles et parasites numériques (The break-ups, Carlos y Gaby), empreinte du mysticisme crépusculaire cher à Lampse ou Miasmah (Pimmon). La palme du pourvoyeur de rêves revient sans conteste à Xela, qui signe avec l’étrange Genmaicha Dorou un voyage émouvant d’un raffinement exemplaire, où sont conviés nappes fantomatiques en lévitation, samples ferrailleux, cordes frottées et pincées touchantes au possible, mélodies dissimulées, qui préparent le terrain à une élégante ligne de synthé vintage qui nous emmène loin. En clôture, Cibelle joue les trompe-l’oeil, se prenant pour un Paris Combo miniature et underground (et fichtrement plus attachant), cisaillé par un intermède bucolique et tristoune comme du Sol Seppy.
Tout comme en matière de thé, la musique selon Static Caravan est une affaire de goût et d’humeur.
Sébastien Radiguet
Tracklist :
01. Max de Wardener : Kettle song
02. The break-ups : Assam
03. Inch-Time : Snow jewel
04. Carlos y Gaby : The tea, makes love to me
05. AM/PM : Shennong
06. Serafina Steer : Mr Sands has left the building
07. Pimmon : Silver needle
08. Tunng : Shove it
09. root70 : Immaculate conception
10. Lord Jim : Teapot waltz
11. Qua : Lapsang Suochong (Iced tea mix)
12. Dollboy : One liner
13. Xela : Genmaicha Dorou
14. Oblong : Four PM
15. Cibelle & Josh Weller : Mr & Ms Grey
label : Static caravan / import
Durée : 66’30
Sortie : 15 septembre 2008
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Le site officiel du label Static Caravan
Le site officiel de la compil Teaism