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Un livre drôle et amusant qui raconte les tribulations picaresques et truculentes d’une bande de chômeurs chevronnés qui sévit sur les pentes de la plus célèbre butte parisienne, terrorisés par une employée cynique et zélée de l’agence Pôle Emploi du quartier bien décidée à les remettre au boulot ou les radier des listes des allocataires…
Champions de la débrouille et de l’embrouille, ils inventent les pires carambouilles pour améliorer leur quotidien, ou simplement survivre, sans succomber aux manœuvres de leur tortionnaire, la belle Sandrine, l’employée exemplaire de Pôle emploi.
La féroce fonctionnaire se laisse cependant attendrir par son plus fidèle chômeur, elle ne le radie pas, elle l’oblige à apprendre le métier de cuisinier, elle a une idée derrière la tête : elle n’envisage pas de torturer du chômeur toute sa vie, elle veut ouvrir un restaurant, elle est passionnée de cuisine, elle a besoin d’un chef. Cette faiblesse passagère va lui faire rencontrer le reste de la bande : un géant noir conseiller spécial des chômeurs égarés, un géant alsacien directeur d’un foyer d’hébergement en cours de cession, un Tamoul génie de la cuisine, une chroniqueuse en sexologie et quelques autres, ils constituent avec sa famille haute en couleur : un mari magouilleur, une belle-mère dévergondée, une fille surdouée et parfaitement amorale, un fils bellâtre efféminé, une micro société où la débrouillardise fait loi tout comme l’absence de scrupule tient lieu de morale.
Cette petite troupe développe sa petite affaire tout en s’érigeant en défenseur de la morale et des plus démunis face aux investisseurs peu scrupuleux et très avides d’acquisitions immobilières dans ces rues qui s’embourgeoisent les unes après les autres. Une façon de défendre l’identité de ce quartier populaire où le bourgeois s’encanaillait, en préservant des mœurs ancestrales et une certaine idée de la résistance aux dictats de l’administration.
Ce livre m’a amusé, j’ai bien ri, le style alerte, vif, enjoué de l’auteure valorise les images inventives et colorées, les raccourcis fulgurants, les formules lapidaires qu’elle distribue à longueur de pages. Mais toute cette gouaille sert aussi à montrer l’émergence d’une nouvelle société, fille de la crise, une société qui a appris à se débrouiller sans tendre la main, en allant chercher ce dont elle a besoin là où il est. Dans ce texte, la société trop réglementée semble avoir enfanté une nouvelle forme d’être et d’avoir.
Denis Billamboz
Petits plats de résistance
Roman français de Pascale Pujol, Yann Kebbi (Illustrations)
Editeur : Le Dilettante
194 pages – 19€
Parution : 19 août 2015