Tous les albums de Tintin : 22. Vol 714 pour Sydney (1968)

Hergé peint, Hergé voyage et, manifestement, Hergé se lasse de son héros. Cette avant-dernière histoire mêle enlèvement crapuleux et ésotérisme. Le ton est sérieux, le dessin méticuleux, mais la magie est en retrait.

Vol 714 pour Sydney Image
© Casterman / Hergé

Vol 714 pour Sidney est mon plus ancien album. J’étais trop jeune pour le lire à sa sortie. Daté de 1971, mon exemplaire appartient à la série « B39 », soit, pour les collectionneurs, la quatrième édition. Bien que je l’aie lu un nombre incalculable de fois et qu’il ne m’ait jamais quitté, c’est loin d’être mon préféré. L’histoire est trop sombre et l’humour pas assez présent. Je lui dois même d’avoir cru, un temps, aux soucoupes volantes. En vain, j’ai scruté le ciel.

Vol 714 pour Sydney couvertureRevenons à la fin des années soixante. Payés à peu faire, les salariés du Studio Hergé s’ennuient. Alors que les ventes s’envolent, le patron connaît une panne d’inspiration. Si pendant des années un Hergé immobile et rivé à sa table à dessin envoyait Tintin découvrir le monde, les rôles se sont inversés. Désormais, un Tintin désœuvré se morfond à Bruxelles, tandis que, accompagné de sa nouvelle épouse, Hergé voyage. Il ne lui faudra pas moins de cinq années pour achever cette histoire.

Entretemps, Hergé s’est découvert une passion pour le paranormal, l’hypnose, la télépathie et les ovnis. L’intrigue doit beaucoup à la revue Planète de Jacques Bergier, que l’on retrouve croqué sous les traits de Mik Ezdanitoff, et à sa théorie des « anciens astronautes ». Jadis, la Terre aurait été visitée par des extraterrestres. Nous leur devrions les Pyramides, les statues de l’Île de Pâques ou les géoglyphes de Nazca.

Une fois n’est pas coutume, Tintin ne répond pas à l’appel de l’aventure, c’est l’aventure qui vient le saisir. Alors qu’accompagné de Haddock et de Tournesol, il se rendait à un congrès astronautique à Djakarta, il est invité à montrer à bord de l’avion de Laszlo Carreidas. Or, le génie du mal et ennemi juré de Tintin, vous avez reconnu Rastapopoulos, a ourdi le détournement de l’appareil afin de rançonner le richissime homme d’affaires.

Variant ses cadrages, Hergé intègre plus de gros plans et affine ses scènes d’action. Admirez les trois vignettes du haut de la page 34. L’avion créé par Roger Leloup est parfait, tout comme le dessin des blockhaus ou ceux de l’irruption volcanique.

Bien mené, le scénario manque de folie. Troquant les commandes de son vieux Mosquito pour celles d’un luxueux jet privé, l’ancien mercenaire Szut a gagné en respectabilité. Or, tout l’album pêche du même excès de sérieux : Milou se tait et les Dupontd et la Castafiore me manquent.

Je retiens la très belle démonstration de savate de Tournesol et le concours de méchanceté opposant Rastapopoulos au déplaisant Carreidas. J’allais oublier le retour fugace du sparadrap qui suscite une rarissime réplique acerbe de Tintin au capitaine : « Vous venez, vous venez ! … Mais c’est aujourd’hui ou demain, dites ? … » Enfin, Tintin se lâche ! Il était temps.

Stéphane de Boysson

Vol 714 pour Sydney
Textes et dessins : Hergé
Éditeur : Casterman
62 pages
Parution : 1968

1 thoughts on “Tous les albums de Tintin : 22. Vol 714 pour Sydney (1968)

  1. Tout de même, Allan qui se demande à qui lui fait penser le nasique reste un des moments les plus drôles de ce volume.

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