« Grind House » version Rodriguez. Après un Tarantino enflammé et passionné mais manquant de reprise sur la distance (à cause d’une overdose de dialogues), c’est au tour du réalisateur de »Desperado » et de »Sin city » de signer sa version des faits. Lui, pour parler d’un genre qu’il affectionne, ne réalise pas un film sur un tueur de jeunes filles avec sa voiture de cascadeur, mais tout simplement une invasion de zombies dégénérés dans une petite ville américaine.
De la référence à l’état pur. Et, puisque comparaison il y a, ce segment paraît encore plus fun que celui de Tarantino : la mise en scène est certes moins acérée, moins travaillée et moins passionnante, mais elle dessert très honnêtement et avec rythme le film dans toute sa longueur. Impossible de ne pas prendre son pied dans ce monument de bétîse, d’action décérébrée et de gore à gogo. Apparitions cultissimes de Bruce Willis, de Tarantino (quelle scène immenssissimes où son sexe se désintègre!!!) et d’autres, scénario certes balisé mais prenant, effets gore ultra-exagérés…un vrai film-hommage volontairement idiot et impur (amusant saut de bobine vers le milieu du film),d’un ridicule qui dépasse l’entendement humain, mais pétri de références ultimes, dantesques et hilarantes. Tout cela tient la route jusqu’au bout, n’emprunte pas d’autres directions (celle qui est prise dès le début est de toute façon à sens unique), et le plein de bonnes idées à la minute rend le film à la fois imaginatif et presque spontané, jusqu’à une fin qui dépasse les bornes du kitsch.
Le divertissement est très honnête, et il serait juste de parler de chef-d’oeuvre compte tenu du but (ressusciter la nullité des séries Z de l’époque),tant le film est stupide et mauvais. Intellectuellement nul, dramatiquement immobile et idiot, le navet est de retour, au bon sens du terme. Car le concept fait preuve tout de même d’un travail colossal sur l’utilisation des élément d’époque : choix des acteurs, décors, esthétique, scénario, ressorts dramatiques (quasi-nuls ceci dit), musique, précision des durées, etc…un beau travail de fossilisation qui s’ancre dans une optique cohérente (comprendre par là dans une filmographie qui a du sens, comme pour Tarantino, qui a construit un mythe sur le renouvellement progressif du passé),et dans un contraire de l’art d’aujourd’hui qui a tendance a privilégier l’intellectualisme (quoique, ça dépend où). Rodriguez et Tarantino ont, eux, leur vision propre du cinéma : c’est avant tout un côté divertissement à ne pas négliger, presque une attraction, qui ne sert simplement que le plaisir du spectateur et qui transgresse totalement l’idée que beaucoup se font du cinéma. Et la façon dont ces deux cinéastes font jouir le spectateur tient de l’euphorie géniale, nous propulsant dans les hautes sphères de la jubilation la plus totale.
Jean-Baptiste Doulcet
P.S. : Le film débute sur une fausse bande-annonce avec Danny Trejo, »Machete »hilarante d’improbabilité. A la fin de »Planète Terreur »nous pouvons aussi admirer la bande-annonce de »Les femmes loups-garous des SS » (un sommet!),dans lequel Nicolas Cage cabotine au plus haut point, puis la bande-annonce de »Faut pas »qui présente des tas de variantes de meurtres, décapitations et autres immondices avec imagination et humour. Un régal !
Film d’épouvante américain de Robert Rodriguez – 2h – Sortie le 14 Août 2007
Avec Rose McGowan, Josh Brolin, Freddy Rodriguez…