Bien qu’encombré du banal cahier des charges hollywoodien, En Cloque transgresse les minces limites des Teens movies, alors qu’il en reprend les éléments de base. Le film déploie ainsi les portraits de geeks attachants et attaché à un humour parfois gras du bide. Mais, il ne se contente pas du minimum décérébrée pour susciter le rire, puisqu’il analyse avec rigueur et minutie les portraits sociaux de bourgeois américains des banlieues pragmatiques. Ainsi, Judd Apatow cligne d’un oeil vers ses geeks allumés, bonhommes tout mous et sympathiques auxquels il rend hommage. De l’autre oeil, il chatouille ces classes bourgeoises, encore crispées par ces petits défauts d’une existence orthonormée.
La vie immature de Ben Stone s’étale encore jusqu’à l’âge adulte. Entouré de camarades, plus glandeurs que désinvoltes, ils passent leurs journées à repérer, dans les films, les seins dénudés des actrices. Espérant même en faire un site Internet référence. Mais, après une soirée arrosée, Ben rencontre Alison, longiligne présentatrice télé. Tous deux glisse inopinément sous la couette. Résultat : la belle se retrouve enceinte de la bête.
Avec pour point de départ la confrontation habituelle des univers sociaux et culturelles différents, En cloque, mode d’emploi retisse le canevas connu depuis Capra de la comédie de moeurs. Plutôt focalisé sur Ben, le film détisse au fur et à mesure le modèle, et chemin faisant, fait apparaître le fil maître du récit : plus qu’un rabâchage, Apatow suit l’initiation d’un marginal vers les normes que lui impose ses nouvelles responsabilités de papa. Mais, la précieuse habilitée du réalisateur brille de sa maîtrise scénaristique. (Apatow a écrit pour de nombreux shows, séries, et films dès les années 90 ). Effectivement, les autres personnages auront tôt ou tard cette prise de conscience face à la normativité. Alison doit être » tonique » pour passer devant la caméra, sa soeur se voit refuser l’accès d’une boîte en raison de sa relative vieillesse, ou encore, le mari de celle-ci cache ses escapades avec ses amis, fans de statistiques sportives de peur que sa femme le ridiculise. Croquant ainsi les prétendues formes de féminité et de virilité comme étant des modèles représentés de ce qu’il faut être.
Cette comédie douce amère ajuste ces questions de conformisme autour du noyau amoureux et familial, puisqu’il est selon Apatow, déjà , l’enjeu principal de ses films, mais également ce cocon fondateur. Ces films rougissent alors d’une authentique révérence à l’amour, valeur triomphante des classes sociales, des normes culturelles, principe familial liminaire à l’éducation(le père de Ben, n’apparaît dans le film que pour lui souffler son amour).
A l’instar de 40 ans toujours Puceau, son précédent film, Apatow orchestre sa dernière production de manière à ne jamais dépasser la rengaine trashi-comique, pour quelque chose de plus noble. Réflexion sur la famille, dans un récit à la fois drôle et sentimental, En cloque, mode d’emploi est une réussite de modération et de justesse.
Maxime Cazin
Comédie américaine de Judd Apatow – 2h10 – Date de sortie : 10 Octobre 2007
Avec Seth Rogen, Katherine Heigl, Paul Rudd
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www.encloque.fr
La bande annonce du film :