Secret Sunshine

A l’instar des voies du Seigneur (trop?) largement invoquées, le quatrième film de Lee Chang-dong – devenu entre-temps ministre de la Culture de la Corée du Sud – est impénétrable. Non par son sujet ni sa narration, mais davantage par le ton froid qui le caractérise et par la complexité d’un récit foisonnant dont il n’est pas aisé de saisir – au sens émotionnel, sinon empathique – les différents rebondissements.

Autrement dit, ce mélodrame – il y est question de deuil et de disparition d’un enfant – doublé d’un polar métaphysique n’utilise pas les ressorts habituels du genre et déroute le spectateur.

Shin-ae quitte Séoul avec son fils Jun pour s’installer à  Miryang, une bourgade campagnarde dont l’idéogramme signifie »ensoleillement secret ». Jeune veuve, Shin-ae respecte le voeu de son époux, en entreprenant de prendre un nouveau départ. Le film installe d’abord une atmosphère presque angoissante, provoquée par l’attitude de Jun : la longue scène d’ouverture où il attend, passif et grognon, en compagnie de sa mère, un dépanneur sur une route déserte, mais aussi sa manie de se cacher. De son côté, Shin-ae, qui ouvre un cours de professeur de piano, suscite les commérages de son entourage par son arrogance de citadine et son indépendance affichée. Le dépanneur du début va devenir un personnage-clef du film, amoureux transi et patient, qui suivra sans découragement et avec une persévérance presque masochiste Shin-ae. On pense dans ce premier tiers du film que nous allons assister à  l’intégration progressive d’une femme d’abord ostracisée.

Mais la soudaine disparition de Jun, épisode à  la fois absurde et pourtant bien réel, fait basculer le film dans une nouvelle direction : comment Shin-ae va se confronter à  ce second deuil. C’est ici que Secret Sunshine risque de déconcerter à  plus d’un titre. Dans un premier temps, elle s’abandonne à  la foi en trouvant un apaisement aussi éphémère qu’exagèrement artificiel dans les pratiques envahissantes d’une religion protestante qui, en Corée, se pare de manifestations quasi fanatiques.
Une visite à  la prison où le meurtrier de son fils a lui aussi rencontré la foi – le film atteint ici sa limite et frise le ridicule – met un point final à  la conversion de Shin-ae qui s’engage dans une série de représailles – plutôt drôles – à  l’encontre de ses anciens amis.

La vie de Shin-ae est en panne dès le départ du film et Lee Chang-dong réussit parfaitement à  décrire l’intérieur de son personnage fêlé. Elle semble souvent encombrée d’un fills dont elle ne sait que faire, qu’elle laisse parfois seul le soir pour sortir avec ses amies. La mort tragique de son enfant confirme et enracine son mal-être. Secret Sunshine montre donc le processus par lequel elle finit par accepter la réalité – sa vie en déroute – et trouver la force à  l’intérieur d’elle-même pour redémarrer.

Epaulé par la composition de Jeon Do-yeon – qui reçut le prix d’interprétation féminine à  Cannes cette année – Lee Chang-dong capte le cheminement et la quête rédemptrice d’une femme. Sujet fort touchant, dommage que certaines longueurs – notamment, la partie religion – l’alourdissent.

Patrick Braganti

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Comédie dramatique sud-coréenne de Lee Chang-dong – 2h30 – Sortie le 17 Octobre 2007
Avec Jeon Do-yeon, Song Kang-ho, Cho Young-jin

La bande annonce :