« On choisit pas ses parents, on choisit pas sa famille » » Simon ne peut contredire cet adage de Le Forestier, tant il s’applique parfaitement à sa vie. Il possède une mère un peu ravagée, ex-baba cool toujours sous l’emprise de substances illicites et, de fait, persuadée qu’un esprit est en elle, en l’occurrence celui de Mick Jagger. Son père est aux abonnés absents, décédé pour abus de drogues lui aussi. Simon a aujourd’hui trente ans et adore sa grand-mère qui est presque la seule responsable du fait qu’il tienne toujours debout. Il partage néanmoins son amour entre Angelina, une fille bien tordue qui lui rend la vie plus dingue et plus passionnante, et Lucile, une chic fille. Simon se demande si l’héritage familial ne lui a pas finalement bousillé une partie de son existence. Ou si, au contraire, il l’a rendu plus fort pour affronter ce fleuve plutôt tourmenté qu’est la vie. « You can’t always get what you want, but if you try sometime, just might find, you get what you need » en quelque sorte, quoi.
Rythme ultra-rapide, style alerte et contemporain, phrases télescopées et heurtées, sentiments contradictoires, forts et passionnés : Cyril Montana, après son » Malabar Trip » justement trippant, continue d’employer ce style énergique et complexe pour asseoir ses personnages fragiles et émouvants. Son dernier opus traite de l’angoissante question de l’héritage donné, tant éducatif que génétique, par les parents à leurs enfants. Et comment ceux-ci essaient de vivre avec ces boulets aux pattes, ces chaînes que l’on traîne et les stigmates d’enfances chaotiques. Pour traiter de ce difficile thème, une belle idée : alterner les souvenirs de Simon enfant avec des épisodes de son quotidien actuel. Ou comment savoir d’où vient son hypersensibilité, comme de découvrir que la vie peut être faite des mêmes erreurs toujours répétées »mais point de glauque chez Montana, juste quelques passages terriblement sombres qui détonent dans une ambiance généralement bon enfant, drôle et tendre : la force d’une écriture haletante, mais qui n’oublie pas d’être terriblement humaine.
Si l’on est en droit de préférer ses précédents romans, »La Faute à Mick Jagger » possède suffisamment d’atouts pour confirmer la singularité de Cyril Montana, et son talent à évoquer des thèmes peu évidents de manière aussi classe et désinvolte.
Jean-François Lahorgue
La Faute à Mick Jagger
de Cyril Montana
Editions Le Dilettante
223 pages – 17 €¬
Publication : 04/01/2008