Héritées de mai 68 et du mouvement hippie américain, les communautés en France ont fleuri au début des années 70. Une manière de vivre qui a permis pour beaucoup de gens de se s’affirmer dans l’idée d’un retour à la terre, de fuir la société de consommation et de vivre simplement une expérience humaine inoubliable. C’est de ce mouvement, et d’une communauté en particulier que témoignent Yann Benoit au micro (et au crayon) de Hervé Tanquerelle dans une formidable bande dessinée aussi libre et attachante qu’à pu l’être ce mouvement social et politique.
Loin des clichés et des caricatures propres au mode de vie communautaire (« tout le monde fume des pétards gros comme ça et couche ensemble » ») Tanquerelle a voulu raconter ce que pouvait être une communauté organisée, structurée, sans hiérarchie mais désireuse de construire un projet de vie en groupe autour de valeurs communes liées notamment à la vie en autarcie et au refus de s’inscrire dans la société de consommation.
C.’est ainsi que l’on va apprendre comment un groupe d’amis décide de racheter une ancienne minoterie pour la retaper et y installer un atelier de sérigraphie. Très vite la petite société va s’organiser, attiser la curiosité des villageois et va finir par sympathiser avec les autochtones, désireuse d’acquérir des savoirs en matière d’élevage et d’agriculture.
C’est cette aventure humaine très riche, cette façon de vivre que nous raconte Hervé Tanquerelle dans un style narratif très drôle et très inventif. Pas facile d’illustrer un entretien de manière vivante c’est pourquoi le dessinateur se représente lui et son interlocuteur dans des situations en rapport avec ce qui est raconté (une fois volant dans le ciel, une fois en haut d’un clocher, une fois sous les traits de souris…) ce qui a pour effet de donner de la vivacité et une vraie légèreté et au récit.
Sans se la raconter, sans joueur l’ancien combattant nostalgique, Yann Benoît revient, tout au long de ce premier entretien (qui sera suivi d’un second), sur les moments forts de la communauté, expliquant parfaitement bien les mécanismes et la philosophie du groupe, s’attardant parfois sur des temps forts (les portes ouvertes, la saignée et le dépeçage du cochon…) mais toujours dans un souci d’explication et de compréhension pour le lecteur.
Un entretien passionnant, un peu à la manière de ceux de Davodeau avec Les mauvais gens, qui se lira d’une traite, avec tout au long du livre un vraie admiration pour ces gens et presque un sentiment de nostalgie pour une époque qui semble bien loin et définitivement révolue.
Benoît Richard
La communauté, (1ère partie)
Dessin : Tanquerelle
Récit : Tanquerelle et Yann Benoît
Editeur : Futuropolis
176 pages N&B – 24€¬
Publication : mai 2008
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