Un peu sans qu’on s’y attende, vers la fin de l’été, Bloc Party a décidé d’anticiper la sortie physique de son nouvel album en le distribuant en mode électronique via son site internet. Un album annoncé par le single avant coureur Mercury diffusé en primeur sur une radio anglaise. l’album » physique » publié par Wichita / Cooperative music devrait arriver en bacs fin octobre si on ne se trompe pas dans les délais annoncés de ci de là sur le web.
On ne saura jamais si le groupe a joué ici surtout sur l’attente de la base de fans fidèles pour squeezer une partie du business physique et limiter les intermédiaires. Toujours est-il qu’à ce jour aucun de nos magazines papier chéris n’a encore fait ses choux gras de la sortie du nouvel opus (se réservant peut-être pour la sortie CD) avec peut-être un effet sur les ventes ? Bizarre.
Après tout d’ailleurs on s’en fout non ? Reste néanmoins qu’on se demandait ce que l’album nouveau (qui empruntera sans doute son visuel au premier Suede), avait dans le ventre. Et en préambule on se permettra de dire qu’on n’était que fan mou du second opus de la troupe de Kelechukwu Rowland Okereke. On le trouvait un peu nombriliste suivant une quête intérieure, intellectuelle, urbaniste et auto-satisfaite dans laquelle on avait du mal à se retrouver. Un essai qu’on trouvait aussi moins immédiat qu’un premier album qui nous avait quant à lui immédiatement séduit. Pas nul non, mais moins » pop » dans ce que le pop/rock peut avoir parfois de plus jouissif, primaire et excitant. Ceci pour situer notre relation avec la musique de Bloc Party. D’ailleurs encore très au-dessus de celle d’autres chroniqueurs de ce petit webzine
l’expression sera sans doute mal comprise de beaucoup. Tant pis. On trouve quant à nous que le nouvel album de Bloc Party réussit techniquement via Jacknife Lee et Paul Epworth ce à quoi aucun album de Garbage n’est jamais parvenu. Soit à prendre des guitares tout ce qu’il y a de plus standard, les passer à la moulinette d’une production qui s’applique à les synthétiser, à les nettoyer, les plastifier, puis y ajouter des dizaines d’artifices électroniques »et néanmoins continuer à apparaître humaines, jamais cliniques et toujours fendant les bûches. Exploit sur lequel Garbage s’est toujours cassé les dents.
Bloc Party se recentre (un peu bourrin) sur ses basiques : de la mélodie performante, une pop d’obédience anglaise, des réverb.’, une pointe de miaulement Robert Smithien, des guitares agressives, massives, rageuses, une batterie en quatre temps. Un son puissant, massif, qui tape le mur du son. Mais le groupe parvient aussi à ne garder que le meilleur des éléments » dance » d’un précédent opus qui se perdait trop souvent entre U2 et volonté d’électroniser sa pop pour la glisser vers la piste de danse. Le groupe en récupère cependant quelques éléments qu’il tourne vers un big beat brut qu’on croirait chipé au surrender de Chemical Brothers tant il charrie de tensions. Ou vers une volonté à réussir quelque cross over entre la scène, le pub et le club. Certains ici diront » boursouflé « . Je répondrai : efficace!
Ici l’alchimie est parfaite entre le gimmick qu’on chantonne » my mercury is in retrograde » le loop qui entête le cerveau exstasié et la guitare qui fend la bise -un poil post punk – sans jamais se vautrer dans le piège du goth. Le chant de Kélé Okéréké se bat en duel avec la guitare de Russell Lissack sans qu’on sache jamais réellement qui des deux remporte le combat : l’athlète au chant féminin ou le gringalet à la guitare massue. Le chant sait où il va, et on se dit que la moitié de l’album pourrait être publié en single. La guitare, ronde et grasse, ne veut pas être en reste : malgré une production surdimensionnée qu’on perçoit dès l’abord, elle continue à être un instrument vivant, volatil, indomptable. Malgré sa » plastination » elle continue à avoir une âme, une puissance, un réelle chaleur humaine. Derrière les fûts Matt Tong affirme quant à lui sa présence, confirme son rôle dans la création de cet album d’urgence, comme jamais auparavant.
Et quand le disque se termine, on se rend compte qu’on en aurait pas écarté une minute (allez si peut être un ou deux titres en milieu d’album), qu’on est capable de fredonner la moitié de Intimacy, et qu’on a qu’une envie au moment de se confronter à la foule du quai numéro 8 à 9h01 Gare saint Lazare : pousser le volume à fond, glisser le fidèle Technics sur les oreilles et voir tous ces corps se ruant vers un RER déjà bondé comme les pièces mobiles d’un opéra rock urbain dont Intimacy serait la bande son. Le nouveau Bloc Party, plus encore que son prédécesseur ou de manière pus adéquateet moins ostensible, est en osmose avec le paysage urbain contemporain: aseptisé en apparence, rock sous les pavés ou grondant sous l’écorce, prévisible comme un essaim de voyageurs pressés et grouillant comme une ville au petit matin. Sans doute le meilleur album (brit)pop/rock paru en 2008. Rien de moins. Tant pis pour les quolibets que je vais prendre.
Denis Verloes
Tracklist
01″Ares » – 3:30
02″Mercury » – 3:53
03″Halo » – 3:36
04″Biko » – 5:01
05″Trojan Horse » – 3:32
06″Signs » – 4:40
07″One Month Off » – 3:39
08″Zephyrus » – 4:35
09″Talons » – 4:43
10″Better Than Heaven » – 4:22
11″Ion Square » – 6:33
Date de sortie: 28 octobre
Label: Wichita / Cooperative music / Pias
Plus+
Le site officiel
L’espace Myspace
Les vidéos via Google
La chronique de Silent alarm
La chronique de a weekend in the city
La vidéo de Talons via Youtube