Tours. Ses ruelles médiévales, son centre ancien, ses places majestueuses, son caractère bourgeois et »royal » ses bords de Loire sublimes, et…ses transexuelles. C’est effectivement dans cette grande ville provinciale, tranquille et quelque peu hautaine, qu’a décidé de s’installer une assez grande communauté d’hommes ayant choisi de changer de sexe, de peau, et, de fait, d’identité sexuelle et sociale. Juliette y vit en colocation avec Zaza, militante acharnée d’une association pour la reconnaissance des »T-girls » et qui prépare pour l’Université un grand colloque sur les transidentités. Autour de ces deux demoiselles gravitent nombre d’ami(e)s, d’ennemis, de passion, de jalousie, de violence, de rires, et de déprimes.
Bienvenue dans le monde des »she-males » : la fiction française ne s’était (à ma connaissance) jamais aventurée dans un terrain aussi casse-gueule. Juliette Jourdan y rentre pourtant de plein fouet, en jouant la carte du romanesque, parfois de la futilité qui le dispute à la gravité des situations que connaissent ces nouvelles femmes qui veulent une seule chose finalement : la reconnaissance. Et elle réussit son pari.
Car loin de l’auteur l’idée de faire de son ouvrage une thèse sur ce sujet encore un peu tabou, aucune trace d’un quelconque militantisme forcené à sa lecture, et il n’est pas non plus question ici de lire un journal intime inintéressant sur une transexuelle qui a du mal à s’assumer : Le choix de Juliette a le bon goût de mélanger les genres sans céder au pensum ennuyeux, on y trouve des pincées de conversations coquines saupoudrées des dernières tendances mode empruntées à Sex and the city, on y touve également de véritables morceaux de bravoure, sanglants et tragiques, qui vous prennent aux tripes, et des moments doux et bleutés, quand les filles ont du vague-à -l’âme et des idées trop noires, un peu comme tout le monde quoi. C’est un vrai roman sur Tours, un vrai roman de filles, un roman vrai.
Et si la fin paraît un peu ennuyeuse, notamment dans les détails du colloque qui font virer le livre au documentaire trop explicatif, c’est parce que jusque-là , Juliette Jourdan aura parfaitement fait oublier la singularité de ses personnages, de ces »Male-to-Female » : elles sont »human after all » ce que ne renierait pas les Daft Punk.
Jean-François Lahorgue
Le Choix de Juliette
de Juliette Jourdan
Editions le Dilettante, 347 p., 22 €¬
Date de parution : janvier 2009