Coeur animal

affiche_5.jpgAvec Coeur animal (2008), Séverine Cornamusaz livre un film à  la fois violent et beau, l’histoire d’un couple à  la dérive tanguant dangereusement, avec pour cadre l’errance majestueuse des Alpes suisses. Pour son premier long-métrage, la réalisatrice helvétique nous plonge dans un étonnant drame naturaliste qui mêle audacieusement cruauté et espoir »

Librement inspiré du roman de Noëlle Revaz, Rapport aux bêtes (éditions Gallimard, 2002), Coeur animal, d’emblée, nous catapulte dans les limbes des rancoeurs et hautes solitudes, le tout dans un décor grandiloquent : une image léchée offrant en abondance la vision sauvage d’un paysage de rude montagne avec son ciel incertain, ses vaches grasses, ses bâtisses en pierre et ses montagnes menaçantes.

l’histoire de Paul (Olivier Rabourdin) et Rosine (Camille Japy), couple recroquevillé dans une vieille masure peuplée d’animaux, se déroule dans un quotidien immuable : silence et non-dits, disputes, coups octroyés généreusement par Paul à  Rosine.
A propos du personnage de Paul, Séverine Cornamusaz commente :  » C.’est un handicapé émotionnel qui n’a pas appris à  être avec les autres. Il s’y prend mieux avec les bêtes » »

Une fatalité marquée par la répétition d’actes mécaniques, dictés par les nécessités de la vie paysanne : traite des vaches, travaux agricoles »l’arrivée d’Eusebio (Antonio Buil), un travailleur saisonnier – surnommé dédaigneusement  » l’Espagne  » par Paul – hébergé par le tyran/gros plouc va accroître la densité dramatique de ce Coeur animal, dotant cet improbable trio d’effets humoristiques.

La violence des rapports humains au sein du couple – et aussi la jalousie de Paul envers le nouvel arrivé – est sans doute l’aspect le plus visible du film et son moteur pulsionnel. En étant eux-mêmes, Paul et Rosine apparaissent dans une vérité crue. La réalisatrice commente :  » Les personnages sans masque social m’intéressent particulièrement puisqu’ils permettent de révéler de façon brute et directe la réalité des rapports tendus d’amour et de haine qui lie deux êtres humains au sein d’un couple. « 

Heureusement la réalisatrice saupoudre son naturalisme noir de chaleur humaine et d’une certaine liberté humoristique. Progressivement, les profils psychologiques des personnages apparaissent plus subtils – notamment à  partir de l’hospitalisation de Rosine, tabassée par Paul ! Eusebio, sans dissiper la méfiance de Paul, réussit à  apaiser son sentiment de solitude. La deuxième partie du film, plus sereine, permet un regard plus distancié et moins critique sur la violence des personnages, comme semble l’exprimer Séverine Cornamusaz :  » Je ne crois pas un seul instant à  ce binôme bourreau/victime. Paul n’est pas assez †˜sophistiqué.’ pour être pervers dans sa violence. « 

La dernière scène de Coeur animal s’avère à  l’image de l’ensemble du film : âpre, ambigüe, paroxystique »
Coeur animal est un film cruel, parfois drôle, truffé d’obsessions quotidiennes.

Une oeuvre étrange d’une beauté redoutable »

Thierry de Fages

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Coeur animal
Film suisse de Séverine Cornamusaz
Genre : drame
Durée : 1 h 30
Sortie le 11 novembre 2009
Avec Olivier Rabourdin, Camille Japy, Antonio Buil Puejo,…

La bande-annonce :