Si Jean-Luc Godard reste l’un des maîtres incontestés du cinéma français, il n’en demeure pas moins insaisissable, énigmatique et parfois inintelligible.
Son dernier film, Socialisme, est un miroir aux alouettes cinématographique dans lequel se glissent et s’interpénètrent des images décuplées aux sons d’une » symphonie en trois mouvements ». On retrouve quelques plans godardiens (attachement aux pompes à essence, comme pour dénoncer la pompe à fric que représente le système étatique et celui des grandes firmes), une fidélité chromatique sans pareil mais il manque quelque chose. De l’intelligible, peut être.
Au fil de ce patchwork d’une heure et demie mêlant images d’archives, plans HD et autres rêveries saturées, le spectateur reste bouche bée devant la succession de scènes absconses. La trame scénaristique relève plus d’un film expérimental que d’un film commercialement envisageable, à moins d’être un aficionado de films sans fil conducteur. On a seulement l’impression que le réalisateur a fait un film pour lui, pour sa propre mémoire.
En outre, Jean-Luc Godard s’est défilé de la conférence de presse au Festival de Cannes, où son film était sélectionné dans la catégorie » Un certain regard » puis retiré à sa demande, comme s’il ne l’assumait pas et n’avait plus la force de le défendre. On est bien loin de la verve inépuisable et poétique du Festival de 1968″ On vous parle solidarité avec les étudiants, et vous me parlez travelling et gros plans. Vous êtes des cons ! ».
Ce film sera sans doute son dernier, et il est quelque peu dommage qu’il signe son testament cinématographique d’une plume tremblante, et dépourvue d’encre ondine. JLG semble être A bout de souffle et se marginalise en faisant Bande A Part.
Et si l’on était passé définitivement de God’Art à God’Hard.
Tancrède Bonora
Film Socialisme
Film franco-suisse de Jean-Luc Godard
Durée : 1h42
Avec : Catherine Tanvier, Anne-Marie Miéville, Christian Sinniger…
Date de sortie cinéma :, 19 mai 2010