Des histoires d’ovules, de vaches et de contes pour enfants, voilà le livre de Katarina Mazetti, intitulé » le mec de la tombe d’à côté » parce que mademoiselle tombe amoureuse du mec qui entretient la tombe voisine de celle de son copain décédé. Disons le tout de suite, malgré une quatrième de couverture qui s’échine à parler » d’humour décapant » et » d’érotisme ébouriffant » le livre n’est pas bon. A la rigueur, je préfère le bon vieux livre à l’eau de rose, là au moins on sait à quoi s’attendre.
Le problème récurrent des résumés de livre c’est qu’ils sont calculés pour nous donner envie de les acheter, alors, pour plus de sécurité, je fais ici un résumé un peu méchant.
Désirée, aussi appelé » crevette » vient de perdre son petit copain. Elle est veuve, encore jeune, et possède des ovules qui s’agitent follement, genre il me faut un bon spermatozoîde pour que je puisse sortir et voir comment est le monde. Benny, lui, est un jeune paysan qui vient de perdre sa maman. Il hérite du domaine familial. Une ferme c’est du travail, surtout quand les vaches donnent des coups de pattes au lieu de se laisser traire. C.’est deux là se rencontrent au cimetière. Un sourire, libéré d’un instant, un regard, complicité mutuelle mais incertaine, et voilà l’amour qui arrive à bride abattue.
On sait que les histoires d’amours finissent mal en général, c’est une manière de dire qu’il y a toujours des problèmes dans les histoires d’amour. Ici, le problème c’est la culture ; paysan aimant les combats de tracteurs, versus, citadine aimant Jacques Lacan et la poésie. Benny et Désirée décident de tenter quelque chose après ce sourire, enfin ils ne décident rien, c’est la passion qui mène la danse, qui virevolte tellement que Désirée sent sa poitrine rougir, cela est soi-disant la marque d’un orgasme intense, changeant ainsi la donne de son ancien partenaire qui abordait la chose plutôt rationnellement et manquait ainsi le bouton » on « .
Qu.’est-ce que cela va donner ? Qui va embrasser l’autre dans sa vie ? Qui va mettre un coup de poing à l’autre ? Sur qui parier ? Voilà les questions du livre. Des questions sérieuses qui sont, de fait, très intéressantes mais qui sont traitées caricaturalement et, par moment avec un excès de prétention, si bien que l’on tombe rapidement dans un ridicule social teinté d’une histoire d’amour classique. Je préfère le classicisme quand il est seul, ou bien accompagné d’une poésie qui produit un espace d’incertitude et de liberté. Ici, il n’y a pas de liberté.
l’agréable est dans la vitesse de lecture. à‡a pulse, en deux temps trois mouvements on atteint la deux cent cinquantième page, c’est la fin, et on est heureux que cela soit fini. Calmez vous, je ne dévoile rien, de toutes façons il n’y a rien à dévoiler. Les deux protagonistes composent le livre, leurs pensées sur l’un, sur l’autre, ou sur d’autres choses, nous sont livrées sans complexe, ce qui propulse le lecteur à se transformer gentiment en yoyo.
Mais Katarina Mazetti oublie qu’un lecteur c’est souvent capricieux. Au début la tentative est intéressante, cela est plaisant de relire une même situation avec un regard différent, mais cela devient rapidement lassant et répétitif. Il faut l’avouer le livre ne fait que de passer du point de vue de Désirée sur Benny à celui de Benny sur Désirée, puis à celui des vaches, seuls moments importants, – c’est sympa les vaches, elles mangent de l’herbe et vous regardent comme si vous étiez une vieille connaissance à surveiller-.
Loin de moi l’idée de les critiquer, tout comme Jacques Lacan, mais il faut avouer que les deux personnages principaux sont bloqués dans leur représentation de l’autre et du monde social. La raison de ce blocage provient de l’auteur elle-même, Katarina Mazetti, qui fantasme sur la vie paysanne et la vie citadine en reprenant tout ce qui dans l’inconscient commun fait le paysan et la citadine. Benny est donc paysan jusqu’au bout de ses ongles sales, et Désirée, travaillant dans une bibliothèque, aime nécessairement les contes et les enfants. C.’est tout simplement triste de percevoir deux personnages qui n’arrivent à avoir aucun recul sur leurs cultures. Et puis, c’est souvent faux, où se trouve l’étonnement ? La surprise ? Où se trouve cette capacité que nous avons tous et qui fait que nous pouvons apprécier un opéra même si on est un bouseux ? Et inversement, je peux dire la même chose des combats de tracteurs. Katarina Mazetti dépeint un univers déterministe et cela me déplais, surtout quand il s’agit de la matière première du roman.
Il y a des moments, trop peu, par lesquels le livre reprend un peu de souffle. On sort alors de ce marasme social pour considérer l’autre dans son instant. Un geste, une expression qui interpellent, comme le sourire intime de Désirée qui ne s’illumine qu’en présence de Benny. Les corps, espaces d’expression et de reproduction des normes sociales, laissent donc percevoir de temps à autre quelque chose, un intime qui surgit. Là , la beauté du livre se trouve, le lecteur est renvoyé à sa propre expérience. Nous connaissons tous ces expressions et gestes de l’autre qui nous surprennent, qui nous marquent parce que nous les trouvons beaux, parce que nous les aimons. Un sourire, un regard, une manière de dégager les cheveux de son cou, un rire ; cela peut être beaucoup de choses. Malheureusement, ces moments n’arrivent pas à racheter l’ensemble du livre. Benny et Désirée deviennent vite lassants, tout comme leur manière franche de s’exprimer qui, se voulant être une proximité avec le lecteur, ne devient en réalité qu’un éloignement. Ce livre n’est pas le dernier livre publié de Katarina Mazetti, elle en a écrit un autre intitulé » les larmes de tarzan » peut-être est-il mieux, je ne sais pas, je ne l’ai pas lu, et je ne le lirai pas.
Baptiste Moussette
Le mec de la tombe d’à côté
de Katarina Mazetti
Editeur : Actes Sud
Collection Babel
253 pages, 7.50 €¬
parution : 30 mars 2009
Ce que tu ne dis pas, et ça me parait le début déjà d’une histoire qui s’annonce mi catastrophe mi bien touchante, c’est que ce premier sourire au cimetière est donnée de façon très différente par l’un et l’autre. Elle, elle, c’est plutôt un sourire franc, il me plait, tandis que lui, c’est par une sorte de compassion de se retrouver dans ce lieu qu’il fini par esquisser un sourire.
Du coup cet emballement qui fait tout débuter est déjà un malentendu, ça me semble important pour l’histoire en fait !
(et puis moi je l’ai trouvé vraiment drôle ce livre :D)
Hum…je ne suis pas certain d’avoir la même lecture du début que toi. En même temps je n’ai pas le livre sous la main. Peut-être, effectivement, un malentendu, mais ils peuvent avoir des raisons différentes de sourire, ce n’est pas un élément décisif dans l’histoire il me semble, à part le fait que c’est ce qui la commence. Par contre cette scène dans le cimetière est une belle scène, et le sourire (les deux francs :-) est ce sourire spontané que l’on peut faire aux passants dans la rue. Quand à l’humour, je conçois qu’on peut en ressentir, moi je l’ai trouvé surtout triste, ou mélancolique.
Pour un pseudo critique littéraire, bravo les fautes d’orthographe!!! C’est totalement discréditant, désolée pour vous…
J’ai essayé de corriger la plupart des erreurs. Merci de votre vigilance. Quand on a le nez dans le guidon on ne les voit pas toutes malheureusement. Merci encore