Une erreur fondamentale consisterait à se tromper et mélanger les deux filles à turban du moment, la casse burnes ZAZ et l’éclectique Madjo. (tiens je l’avais déjà fait pour le EP celle là je crois, cette vanne pourrie).
l’Evianaise aux racines familiales plongeant du côté du Sénégal évite le côté » traveleuse à djembé » pour toucher plus profondément l’endroit précis où la pop rejoint le jazz, où le français croise la soul et la world musique.
Madjo convoque pour l’aider à réaliser ce premier album Sébastien Lafargue, qui a notamment arrangé la Caldeira de Valérie Leulliot (Autour de Lucie), pour un album qui se place dans la lignée de Fiona Apple ou de Emily Loizeau par exemple et le résultat est charmant.
Sans que l’adjectif prenne le sens habituel de chiant, juste »sympa » ou comme on dirait d’une copine » elle est gentille « . Le disque de Madjo est charmant au sens plein de charme du terme. Il convoque plusieurs traditions et une efficacité de l’arrangement (qui se dévoile sans doute plutôt au casque) qui en font une réussite musicale indéniable.
Le EP introductif nous avait bluffé, tandis que oui c’est vrai la version diluée sur album perd un peu de sa maestria au fil de la redondance, au gré de l’approfondissement de la démarche. L’album sur la longueur n’a pas l’évidence radiophonique des titres ramassés façon EP.
l’ensemble reste pourtant un remède classe – et charmant donc – contre la morosité du matin devant la glace où dans une ligne 3 du métro surbondé. Madjo c’est un sourire multilingue et une musicalité positive, à défaut d’être efficace sur toute la longueur de ce premier album.
Madjo c’est le rebond du funk appliqué au jazz et la méthode de la world musique sans les cithares ou les didjéridoos. C.’est aussi et surtout pour moi, une manière d’aborder la chanson française sans en faire un autel intouchable ou une variété sans âme. Non. On cherche ici le mot simple et juste dans une tradition pop à l’anglo-saxonne. On ne se prive pas d’ailleurs d’aller chanter dans l’idiome de Shakespeare quand le titre semble l’exiger.
Madjo fait se cogner les influences, sans les intellectualiser. Tout est ici simple et fondamentalement pop dans sa plus générale acception. Il ne manque guère en fait que deux trois mélodies qui déboitent à l’instar des deux titres qui passent sur les ondes en ce moment (le nid des sans soucis et leaving my heart qui m’ont pour une fois rendu Audrey Pulvar enchainant après un passage de Madjo dans le 6-9 d’Inter, presque souriante: une gageure ) pour que l’album gagne en immédiateté et en résistance à l’épreuve du temps. On attend la suite, donc avec une grande bienveillance.
Denis Verloes
Label: Mercury/Universal
Sortie le: 13 septembre