Alan Pauls, à l’instar de ses personnages, est un obsédé. Dans Le Passé, son pavé précédent, le narrateur restait bloqué sur ses amours contrariées et sur les conséquences de ses pulsions sur ses actes.
Ici, c’est sa capillarité qui l’obsède, mais qui aussi donne un sens à sa vie.
L’auteur réussit une véritable gageure avec son nouveau roman : construire une trame narrative, invitant l’Histoire du pays argentin à se mêler des histoires intimes de personnages meurtris, et ce uniquement sur la base d’une coupe de cheveux. Il s’agit donc de Monti, enfin des cheveux de Monti, véritables protagonistes du livre. Coupée, rallongée, coiffée, en tignasses, en coupe afro ou lissée, la chevelure de Monti est la trame narrative. Et de ces multiples transformations de coiffure découlent des souvenirs plus ou moins douloureux pour le narrateur, des réminiscences de l’enfance ou de l’adolescence qu’il aurait préféré oublier, le tout associé à une Argentine du 20ème siècle chaotique.
Forcément déroutant, forcément intrigant, Histoire des cheveux n’arrive pourtant pas à complètement passionner. La faute peut-être à une écriture extrêmement précieuse et ample, de longues phrases d’où jaillissent de nombreuses idées, métaphores et figures de style impressionnantes. Du Proust très contemporain, en quelque sorte. Magnifique mais presque épuisant, obligeant le lecteur à rester constamment concentré sur les lignes fleuves et superbes de Pauls très en verve.
Une vraie curiosité en somme, réservée aux plus aguerris, mais qui promet un vrai trésor, comme celui de la fin du livre, que je vous laisse découvrir.
Jean-François Lahorgue
Histoire des cheveux, de Alan Pauls
Editions Christian Bourgois, 220 pages, 18 €¬
Date de parution : septembre 2010