Quand je compte sur mes doigts je me rends compte que ça fait un sacré bail que le frontman de Dead Man Ray a entamé une carrière solo qui l’honore. Une carrière un peu à l’image de DMR d’ailleurs, qui a vu le groupe acquérir une notoriété équivalente à Deus ou Zita Swoon au royaume, mais passer difficilement -pourquoi?- les portes de l’hexagone où la musique du bonhomme aurait largement sa place.
Parce qu’il faut que tu saches lecteur, que pour une raison que j’ignore, Pias Belgique et Pias France ont décidé de réserver un traitement différent à Dead Man Ray et à fortiori à Daan quand il dépasse la frontière symbolique de Quiévrain. Du coup, les albums de Dead Man Ray qui arrivent en république sont des conglomérats de plusieurs albums réunis sous un nom différent. Je sais, je sais lecteur, toi aussi tu te demandes pourquoi ce genre de procédé marketing à l’heure de la mondialisation de l’information via internet, et à l’heure de la proximité linguistique entre la Belgique francophone et son voisin français… Difficile pour un quidam de savoir quel album est disponible dans son bout de territoire, ou de retrouver l’album dont il vient de lire une bonne critique, sur un site dont il ne connait pas la localisation géographique.
Et ça ne va pas s’arranger avec Simple, album sorti en Belgique fin 2010, qui arrive en France fin 2011. Oui parce que le Simple de Belgique comporte seize titres, et le simple de France treize seulements, dont deux inédits. Va t’y retrouver après. Messieurs les responsables marketing tirez-vous une balle dans le pied tout seul, on ne vous en tiendra pas rigueur ;-)
Une fois ce long préambule posé, ne reste que la musique. Et quelle musique. Mazette! Simple devait être un album best of de la carrière solo de Daan Stuyven depuis son premier album ProFools paru en Belgique en 1999. Oui mais le bonhomme se refuse à poser une compilation de ses succès d’estime. Alors il s’est enfermé en studio, avec les morceaux qui ont composé sa notoriété au fil des ans, bien décidé à en donner une relecture personnelle qui en soit une version complètement neuve, transfigurée. C’est un exercice casse-gueule, car à proposer des variantes de ses propres titres on montre finalement au public une version expurgée de ce qui fit aussi leur succès et on risque de démontrer une faiblesse mélodique que les arrangements originaux camouflaient au mieux.
Pour Daan. C’est une réussite haut la main. Stuyven s’est enfermé en studio avec Isolde Lasoen compère habituée des percussions ou batteries du bonhomme, et en compagnie du violoncelliste Jean-François Assy dont Daan admire la palette de sonorités ou d’atmosphères qu’il est capable d’insuffler à son instrument avec ou sans archet -globalement passant du classique au rock sans difficulté apparente. Ensemble le trio revisite les titres de Daan, et en arrache sans aucun remord les oripeaux électro ou disco pour les retravailler à partir de l’os. Lasoen passe des clochettes aux carillons, au piano, au vibraphone, à la trompette et aux choeurs, tandis qu’ Assy ajoute de l’âme et de la profondeur à la musique qui revisite quelques titres du répertoire (5 albums belges) du natif de Leuven. On découvre quant à nous que Stuyven est doté d’un organe vocal dont on n’avait jamais jusqu’ici soupçonné la profondeur et la qualité de crooner.
Ce non-best-of range soudainement Daan pas loin de Iron and Wine ou du French Cowboy hexagonal. Je découvre quant à moi la qualité mélodique du travail du bonhomme qui ne m’avait jamais autant frappé qu’en version »simple ». Le mix fait la part belle à l’intimisme de l’ensemble, à l’introspection et pose la voix sur un écrin un peu sombre, mélancolique qui lui sied bien. Puis, Daan est un sacré chanteur, et cette revisite est une réinvention à l’atmosphère étrangement unifiée. Simple visite un territoire qui va de la country à Elvis Presley avec un charme presque Dandy qu’on ne prêtait jusqu’ici qu’à Richard Hawley.
Idéal pour accompagner une fin de soirée solitaire dans une maison vide, mélancolique sans jamais être larmoyant, simple -qui porte bien son nom – est à la fois une redécouverte du bonhomme qui court à 42 ans et une découverte d’un chanteur dans le plus noble sens du terme.
Un très bel album, homogène malgré la palette d’années qu’il est censé visiter. A consommer sans modération en version treize ou seize titres d’un côté ou de l’autre de la frontière.
Denis Verloes
Label: Pias
Date de sortie France: 17 octobre 2011
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