Le journaliste Sylvain Estibal installé en Uruguay a choisi la parabole, le conte ou la fable pour son premier long-métrage Le cochon de Gaza. Le vaillant animal ramené d’une pêche mouvementée au milieu de vielles chaussures et autres objets disparates par le miséreux Jafaar va susciter nombre de tracas, une cascade de mésaventures cocasses qui ne se veulent jamais ni réalistes ni attristantes, mais réussissent néanmoins à évoquer le conflit qui oppose Israéliens et Palestiniens. Si la bête est impure des deux côtés du mur et ne doit absolument pas fouler le sol, elle offre cependant des avantages inattendus pour la communauté juive, dont Jafaar va pouvoir tirer bénéfice avant que son commerce insolite attire l’attention.
Sans prétention et sans grande inventivité de mise en scène, Le cochon de Gaza révèle quelques bons moments, : recueillir le sperme du mammifère n’est pas une mince affaire et encore moins dissimuler l’encombrant bestiau aux yeux des soldats. l’histoire a beau paraître légère, sinon farfelue, elle ne s’inscrit pas moins dans un paysage de ruines et de gravats. Ce qui reste de la maison de Jafaar et de sa femme Fatima, trouée d’éclats d’obus, est réquisitionné en partie par Tsahal, en l’occurrence deux militaires dont l’un partage avec Fatima la même passion pour la série télévisée du moment. Il y a là une certaine facilité de la part de Sylvain Estibal à transposer le message naîf, pour ne pas dire niais, de réconciliation contenu dans le feuilleton à la situation bien réelle vécue par ses spectateurs assidus. C.’est dans les séquences rocambolesques et kafkaîennes que le film convainc davantage. De plus, on s’attache facilement au personnage de Jafaar, homme banal et effacé, qui essaye de survivre et de tirer profit pour son propre compte de l’infortunée pêche.
Jamais manichéen, ne prenant pas parti, sentiment renforcé par le brassage des nationalités des comédiens, Le cochon de Gaza, en optant pour la fantaisie, parvient toutefois à rendre compte d’une réalité dont on mesure bien à la fois l’absurdité et la pérennité. Le bel et onirique épilogue, message de paix mettant en avant les jeunes victimes des attentats, danseurs de hip-hop mutilés ou handicapés, clôt ainsi l’ensemble sur une note d’espérance en évitant angélisme et jugement.
Patrick Braganti
Le cochon de Gaza
Comédie française, belge, allemande de Sylvain Estibal
Sortie : 21 septembre 2011
Durée : 1h39
Avec Sasson Gabai, Baya Belal, Myriam Tekaia,…
La bande-annonce :