Un peu long pour une bande-annonce (de ce qui pourrait être aussi le pilote d’une série télévisée) ou trop court pour un long-métrage dense avec multiplication de lieux, de personnages, de fonctions et d’interactions. C.’est en résumé l’impression laissée par Contagion, dernier film du prolifique et talentueux Steven Soderbergh dont la riche filmographie est une alternance entre productions hollywoodiennes – gros budget et casting de stars – et †˜petits’ films d’auteurs expérimentaux et confidentiels, comme Bubble (2005) ou Girlfriend Experience (2009).
Du point de vue du réalisateur de Traffic (qui dans sa démarche de thriller et d’enquête se rapproche le plus de Contagion), la propagation rapide à l’échelle planétaire d’un virus inconnu et particulièrement redoutable dans ses mutations ne peut pas donner naissance qu’à un †˜simple.’ film-catastrophe aboutissant à la destruction fulgurante de l’humanité. Au contraire, l’intérêt majeur du film, mais qui hélas s’émousse au fur et à mesure, c’est le parti pris d’un traitement froid et documenté, bourré d’informations. Contagion égrène ainsi le décompte des jours (en ne révélant qu’à l’extrême issue le fameux Day 01), de l’identification de la pandémie à la mise en place des mesures de protection par les institutions internationales, en passant par la reconstitution des conditions qui aboutirent à la survenue du virus et par la recherche effrénée d’un vaccin. Après une introduction haletante filmée dans différents points stratégiques (Hong Kong, Tokyo, Londres, Chicago, San Francisco), le film s’essouffle petit à petit, passé la mise en place et la présentation succincte des différents protagonistes. Tout est dense, traité de manière saccadée, sans respiration, provoquant le tournis et le désintérêt. Le choix et l’organisation des protocoles déployés sur tous les continents (sauf l’Afrique et l’Europe curieusement absentes du film au profit de l’Asie clairement désignée comme responsable et les États-Unis omniprésents) auraient mérité plus de temps et d’éclaircissement. Le film en devient un objet étrangement hybride, oscillant entre reportage documenté et blockbuster (les moyens considérables et la liste des comédiens). l’hybridation conduit logiquement à celle du jugement, en demi-teintes. En clair, on reste sur sa faim, d’abord subjugués et happés par le rythme intrépide, puis ennuyés lorsque le film se déporte en se concentrant sur la vie privée – et somme toute sans grand intérêt – de certains personnages, comme si Steven Soderbergh avait fini par se lasser de son sujet pourtant passionnant en soi.
Patrick Braganti
Contagion
Drame, thriller américain de Steven Soderbergh
Sortie : 9 novembre 2011
Durée : 01h46
Avec Matt Damon, Marion Cotillard, Jude Law, Kate Winslet,…