Dans une indifférence quasi totale en France, Lamb a sorti son 5e album en mai. L’éternel second des années trip hop a pourtant encore de beaux restes.
Les choses pourraient quand même changer avec un nouveau clip, un nouvel EP mettant en avant le single Build a Fire (agrémenté de remix), une tournée européenne prévue en 2012 et (enfin !) une attachée promo aux commandes chargée des affaires du duo pour l’hexagone. Bref, vous avez une séance de rattrapage pour vous plonger dans le cinquième opus des Anglais sobrement intitulé 5. Lamb a toujours évolué dans l’ombre de Bjork, Portishead ou Massive Attack dans ces années trip hop où il suffisait d’avoir une bonne chanteuse, de mettre des programmations lentes derrière pour vous rendre immédiatement fréquentables. La paire anglaise valait évidemment mieux que cela et surtout avait trouvé un son spécifique la singularisant des monstres sacrées du genre et du reste du troupeau.
La raison de ce son »Lamb » est plus à chercher du côté d’Andy Barlow, multi-instrumentiste et producteur du duo que de la pourtant troublante chanteuse Lou Rhodes et sa voix d’ange qui a du grain (la dame a une vraie personnalité vocale). Mais Barlow a pour lui d’avoir su utiliser savamment des rythmiques drum’n bass donnant un aspect percussif à la musique. Associée des mélodies classieuses et une humeur mélancoliques, cela a toujours donné des titres particuliers. Il y avait d’un côté Gorecki (inspiré par la 3e symphonie du compositeur polonais) et de l’autre B-Lines, un des singles les plus déjantés des années trip hop.
Après un passage un peu raté sur une major (Between Darkness and Wonder en 2003), le duo avait mis un terme à sa carrière, chacun des deux se consacrant à d’autres projets (album solo, nouveaux groupes, producteur de Fink pour Barlow). Finalement, les revoilà : une reformation en 2009, des concerts, un album live cette année et finalement ces onze nouvelles compositions.
Lamb n’a pas vraiment changé, pratiquant le même genre de mélange qui avait fait sa spécificité. On peut le regretter ou s’en réjouir. Mais une chose est sûre, avec 5, on remarque à quel point la musique du duo vieillit bien, ce qui n’est pas le cas pour tout le monde. Au classicisme des mélodies magnifiées par la voix de Lou et l’utilisation de cordes répond le traitement sonore de Andy dans une électronique affirmée qui, elle, ne fait pas dans le propret, le consensuel et le mainstream. Le groupe n’a pas peur de faire dans le musclé (Build a Fire), de faire sentir l’odeur de la jungle dans un tribal Strong The Root ou de plaquer de grosses programmations sur un titre au mysticisme folklorique proche de Dead Can Dance (Last night in the sky). Avec Lamb, un bon équilibre donne de bons morceaux. Dans 5, il y a des titres d’un romantisme mélancolique certain (Another Language, wise enough), qui grâce à l’électronique ne tombe ni dans le pompier. Il y a aussi des titres plus drum’n bass à la noirceur larvée (Butterfly effect, she walks, les meilleurs de l’album) qui grâce aux lignes de chant ne deviennent pas , arides., Et tout naturellement quand le travail d’Andy Barlow s’efface et que les machines sont mises au rencard, Lamb devient banal, limite niais (Rounds ou dans une moindre mesure).
Lamb n’est jamais meilleur que quand il semble en porte à faux. A la fois exigeant, radical et grand public.
Denis Zorgniotti
Date de sortie : 5 mai 2011
Label : Strata music
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En concert le 18 février 2012 au Café de la Danse (Paris)
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Video de Build a Fire