Moonman and the Unlikely Orchestra – Mascarade Labyrinthe

En dehors des modes, Moonman creuse son sillon entre ligne droite et chemins biscornus. Efficacement rock et pourtant complexe.

A l’instar d’Angil, Moonman a d’abord été seul. Les deux ont le pseudo court, les deux ont d’abord sorti des disques folks assortis ou pas de machines. Les deux ont finalement formé un groupe autour de leur personne ; The Hiddentracks pour l’un, The Unlikely Orchestra pour le second. La comparaison s’arrête là  car depuis ce moment, les musiques d’Angil et de Moonman se sont diamétralement séparées.

, Necessary Alibis, précédent opus, , était donc le premier album d’un vrai groupe, ; ce nouveau Mascarade Labyrinthe est le premier album d’un groupe live, nouvelle étape importante pour ne pas dire essentielle dans l’évolution artistique de Moonman (and The Unlikely Orchestra donc). , Ce qui nous vaut un étrange paradoxe d’un groupe qui n’en manque pas, l’album a longtemps été peaufiné (5 ans se sont passés depuis Necessary Alibis) pour finalement retrouver l’esprit du live, son urgence et sa spontanéité.

L’évolution est donc essentielle car le groupe francilien fait du rock, du vrai, tirant son essence du rock indé américain des années 90. , L’ensemble est donc électrique et s’ouvre d’ailleurs sur un larsen réglementaire et quelques reflux hardcore , sont même à  prévoir. , Mais pour compenser, les mélodies ne sont jamais en reste apportant largement de la pop dans cet univers musclé. Cela nous vaut quelques gimmicks irrésistibles (Big Deal, l’impeccable instrumental The Glorious ways of Don Corleone), quelques riffs ravageurs (Fail to Surprise), quelques refrains fédérateurs (Randomizer) ; au final pour autant de morceaux qui font mouches. Cela nous vaut même un Bubble Boy, débarrassé de l’artillerie lourde, affichant une belle ligne claire dans une mélodie aérienne chantée à  deux voix (fille et garçon) et , un impressionnant, Deity Girl tout en retenu et en touches impressionnistes.

Finalement, Moonman and the Unlikely Orchestra est un groupe fin. Et personnel. Car avouons-le, ils sont nombreux à  faire ce genre de musique ;, Shellac,, Sonic Youth,Blonde Redhead, les références avoués du groupe (auxquels j’ajouterai Faith No More) ayant durablement marqué les esprits. Et la seule efficacité naturelle des morceaux et le savoir-faire mélodique ne peuvent plus être les seules raisons de craquer sur Moonman and The Unlikely Orchestra. C’est déjà  beaucoup mais avec le temps, on devient difficile. Et justement, derrière les rythmiques lourdes, les mélodies speed et accrocheuses se cache bien autre chose.

Car il y a bien deux ou trois morceaux dans chaque et ce constat est valable sur tous les titres, aussi bien longs que courts. Wings of Fire (2’54) a beau avoir un petit côté Digging the Grave, le morceau n’exclut ni accalmie ni ouverture finale vers une autre mélodie., Moonman and The Unlikely Orchestra a l’art de la punk song protéiforme. Ce constat est encore plus flagrant sur les morceaux longs, ceux où le groupe a tout loisir de jouer la rupture de ton et le changement d’ambiance, , de la clarté à  la saturation, de la légèreté à  la force. S’il n’est jamais torturé, le trio est quand même tortueux. A l’instar de Sonic Youth, il est abrasif mais à  l’image de la bande à  Thurston, il sait ménager aussi des plages entières de pure musicalité, où la chanson devient musique. Certains y verront l’influence du post-rock et ils auront raison mais, Moonman and The Unlikely Orchestra a pour lui de tenir sans cesse l’édifice et de rester totalement dans le giron d’un rock néanmoins direct. Comme quoi, on peut se lâcher dans un rock qui défoule tout en écoutant de la bonne musique, intelligente et lâchons le mot, sensible. Respect.

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Denis Zorgniotti

En Concert : Au Glaz’art (Paris) le 18 février (+ Lolito)
Date de sortie : 20 février 2012
Label / Distributeur : Greed Recordings / Believe

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