L’écrit du marasme. Virginie Lou-Nony n’avait probablement pas prévu que la sortie de son nouveau roman coînciderait avec ce temps de crise que nous vivons.
Marasme économique, marasme social, marasme sentimental, : les personnages de Décharges, évoluent en mode survie dans un monde au bord du gouffre, du burn-out que l’auteur sait décrire avec la bile fiévreuse qu’il convient. Et qui nous secoue.
On suit non sans peine Eva, quittant son boulot dans une rizerie du Sud de la France soumise à une délocalisation forcée, pour partir avec son mari et ses 3 enfants dans l’Est, pour trouver un job, de la sérénité et de la paix. En vain, un couple qui ne respire plus, des enfants comme absents, une reconversion en aide-soignante pour jeunes handicapés en rééducation fonctionnelle. Des vies juvéniles en lambeaux pour sa vie en charpie qu’Eva tente de maintenir malgré tout. Seul Gabriel, jeune patient paraplégique possédant une grâce et une aura irrésistibles, saura illuminer la vie si sombre de l’héroîne quasi-zombie.
A prori, le propos de l’auteur, ainsi résumé, ne fait pas dans la dentelle. Et pourtant, la violence du style colle parfaitement à la violence du propos. Même quand elle évoque la sensualité, ses mots s’entrechoquent, les phrases s’imbriquent à une vitesse folle…
» Et là , au seul contact de ma cuisse contre l’accoudoir, le temps ne passe plus. La poitrine s’ouvre en grand. La peur s’efface. L’air se fait léger, paisible. On voudrait que tout s’arrête aussi, se suspende…Mais il faut s’arracher à l’aimant, se dégager de la force, et alors le temps reprend, le décompte des minutes, la mort patiente, pas d’autre issue que la fuite, les yeux fermés, l’apnée., «
Et le lecteur d’être emporté dans ce flot (presque boueux) de narration fiévreuse, de situations dures, imporobables ou poétiques, collé au train de ce personnage hors normes et des rencontres, rêves ou désillusions qui jalonneront son existence passée à lutter pour la dignité, le respect et l’amour.
Virginie Lou-Nony signe avec Décharges le roman décisif sur notre époque dure, en souffrance et qui mène ses citoyens dans le mur, envers et contre tous. En 2012, année d’une possible apocalypse, elle écrit déjà les prémisses d’un » no future, » mais avec une flamboyance remarquable.
Décharges, de Virginie Lou-Nony
Editions Actes Sud, 208 pages, 18 €¬ environ
date de parution : février 2012.
Jean-françois Lahorgue
je viens de finir ce merveilleux livre rempli d’image une seule chose m’a déplu pourquoi en début de livre et à la fin ces passages de ‘sexe’ ?