Un nouvel album des trop rares Tokyo/Overtones est en soi une bonne nouvelle. D’autant plus avec, The Underground Karaoke ou la quintessence d’une pop élégiaque et néanmoins moderne.
6 ans à attendre un successeur à un premier album éponyme. Il y a eu certes un EP en 2010 mais insuffisant pour vraiment étancher la soif d’un manque que le talent des Havrais a su créer. Ce laps de temps trop long, sans doute dû au manque de moyens dont souffre ce petit groupe indé, a finalement servi leur affaire ; à savoir que Tokyo/Overtones a longtemps pensé et peaufiné son album pour en faire un sommet de pop moderne à la classe internationale. Une oeuvre élégiaque , qui ne manque pas de souffle.
Même désargenté, The Underground Karaokes’offre le luxe d’une production impeccable (sous la houlette de David Fontaine d’Aña) et même d’un quatuor à cordes sur plusieurs titres. Emily B Green, repérée en solo ou aux cotés de Nicolas Overhead Leroux, participe aussi à quelques titres, au piano ou comme choriste de luxe.
T/O arrive en quelques secondes et quelques accords à séduire illico presto l’auditeur., La force du groupe est de jamais s’arrêter en si bon chemin, trouver d’autres mélodies, idées, harmonies irrésistibles au sein d’ un même morceau et faire monter la musique dans une ivresse de claviers et de guitare. C’est le cas dès l’ouverture et, 30 Nerves, déjà présent sur l’EP de 2010 et qui place d’emblée le groupe sur orbite., Tout est chiadé à l’extrême sans que cela soit lourd, vain, abscons ou maniériste. C’est juste beau ; de ce genre de beauté qui vous emporte dans un torrent de puissance évocatrice et d’émotions. De The Alpha Child qui évoque aussi bien la mélancolie diffuse d’Ennio Morricone ou de Air à Brother jack qui commence par des programmations organiques, pour finir dans une new wave élégante du meilleur effet en passant par Jane Dollar, autre montée vertigineuse. Il y a du Coldplay, du Notwist, du Radiohead voire du Depeche Mode sur Haziel Killer, sans que T/O, n’ait à rougir d’aucune de ces avantageuses comparaisons.
T/O serait amené à devenir un groupe important s’il était né à Oxford ou Manchester et non au Havre la plus anglaise des villes rock françaises. Mais effectivement, l’engeance du groupe lui épargnera cette mise en lumière dommage. Le karaoké, promis par le titre et possible aux vues de la qualité du disque et de son potentiel fédérateur, restera underground. En même temps, il est difficile de suivre le chanteur Laurent Ambroggiani sur son terrain , il n’a jamais été meilleur qu’aujourd’hui.
Sans dénaturer sa complexité d’écriture et ses arrangements classieux, T/O est donc »grand public » à sa façon et le single du disque Bipolar Girl en est le meilleur exemple : une électro-pop frondeuse à la pulsation hautement séductrice, comme la rencontre de Digitalism et de la pop anglaise. Vraiment un grand cru qui peut nous faire profiter de T/O pour quelques années en attendant une nouvelle épopée underground.
Denis Zorgniotti
Date de sortie : 6 février 2012
Label : Elko Vox / Microcultures
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Video de Bipolar Girl