Boulbar est bien le genre d’artiste qui sort la chanson française de son train train, mieux il réactive le rêve américain. On the Road with Boulbar !
En 2009, Bertrand Boulbar avait sorti Requiem pour un Boxeur, un album concept couplé à une BD racontant l’histoire d’un boxeur déchu dans les années 60. L’oeuvre ambitieuse était passablement réussi et plaçait son auteur dans la catégorie des artistes visionnaires. Dans une France souvent engluée dans une Nouvelle Chanson Française nombriliste et anecdotique, cela faisait rudement du bien.
Avec Motor Hotel, Boulbar, pousse plus loin sa fascination pour l’Amérique et propose un nouveau voyage, meilleur que le premier. Pourquoi pas dès lors faire un véritable road trip musical traversant les Etats-Unis d’Est en Ouest, composant sur la route et assortissant ce voyage de pionnier d’un reportage photo ? Après l’Amérique rêvée, l’Amérique vécue, même si ces deux visions sont inextricablement mêlées.
Il faut dire que plusieurs rêves américains existent, se complètent, s’affrontent. Avec Boulbar, encore plus que la Beat Generation, c’est bel et bien l’Amérique décrite par Bukowski, nommément cité sur J’aime Bukowski, qui trouve grâce à ses yeux. L’écrivain , représente ce paradoxe américain, celui d’être un gros dégueulasse (je cite) tout en étant un poète génial, une humanité bien caché derrière les cadavres de bouteille (joli formule). Cette dichotomie se traduit dans Motor Hotel spécialement dans D’autres Etats, (Utah) entre fange et beauté, entre western poisseux et pop céleste.
L’ Amérique , décrite par Boulbar, c’est celle des motels miteux, d’un ennui endémique, de personnages cabossés par la vie , (Joe un ancien du Viet-Nam) mais aussi de grands espaces urbains ou sauvages désertifiés ; une autre Amérique au final très cinématographique. Après son arrivée à New York, moment de transition entre deux eaux (New York 6 heures du matin), Boulbar se retrouve rapidement (dès le deuxième morceau) au coeur de son sujet en nous plongeant à Burnsville, Virginie. C’est le début d’un vrai périple qui le voir avancer inexorablement toujours plus avant vers l’Ouest.
Musicalement, le Français rêve aussi d’Amérique, transportant son écriture française et sa voix chantée-parlée dans une vraie mythologie musicale américaine, électrique à souhait, où un harmonica vient souvent hanter l’horizon et un orgue embrumer l’atmosphère. Entre Yves Simon, Jean-François Coen, Coutin ou plus récemment My Concubine, Boulbar n’est pas le premier mais lui, encore plus que les autres, affiche cet amour-là , en faisant même le sédiment et la raison de son disque. Cela donne de sacrées ambiances entre chien et loup (De vent et de poussière dans le Nevada), une musique prenante rappelant parfois, REM de Murmur (Help Me).
Le voyage s’arrête face au Pacifique à San Francisco , dans une belle tristesse crépusculaire , où le songwriter désabusé essaye de retrouver traces de l’utopie des beatniks. Le voyage est définitivement sans retour.
Denis Zorgniotti
Date de sortie : 27 février 2012
Label / Distributeur : Roy Music / Universal Music
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Vidéo live de Motor Hotel
Vidéo de Je cherche ta voix
Vidéo de Burnsville
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