Soko est Stéphanie Sokolinski à la ville. Et je ne sais pas pourquoi, depuis qu’on voit son minoi sur les plateaux télé à l’occasion de la sortie de I thought I was an alien, je pense à Vincent Gallo.
Je sais c’est complètement crétin. Les rares choses que les deux artistes ont en commun c’est le cheveux un peu gras et échevelé, la retraite américaine et l’hésitation perpétuelle entre la comédie ou la musique. Ca doit être à peu près tout. Ah non je me trompe, il y a aussi la reconnaissance des hipsters de la musique un peu bobo. Oulah, mais voilà un tableau peu engageant te dis-tu, à l’instant où moi je me rends compte l’avoir écrit. Voilà un pur produit de la hype à oublier, oubliable, interchangeable à la prochaine saison. Oui. Il y a toute la panoplie pour que je démonte. Mais oui décidément l’album vaut bien plus que le tableau narquois que je viens de peindre.
En 2007 Soko sortait son premier EP not so Kute. Suite au buzz de Myspace, et à l’enthousiasme né autour de la Bordelaise; a cru cette imagerie que je viens d’évoquer. Est née aussi une hésitation existentielle pour la demoiselle qui a tout envoyé balader le monde de la musique et s’est retranchée aux Etats-Unis, où elle a tout de même profité d’un joli entourage musical. On ne saurait évoquer cet entourage sans parler d’Edward Sharpe and the Magnetic zeros et son leader Alexander Ebert dont elle finit par se faire un compagnon de route à la ville. Retraite au soleil de californie plutôt que d’enchaîner du EP vers l’album. Elle pense quitter la musique à jamais pour rester artiste de comédie. Mais…
Soko finit par sortir en 2012 l’album qu’on attendait à l’horizon 2009. Ne serait sa voix chevro-chuchotante perpétuelle, je serais totalement convaincu par la demoiselle et renierais mes blagues de début d’article. I thought I was an alien parle en mode mineur, de la relation entre un homme et une femme et de l’échec du couple aussi un peu. Et le fait de très jolie façon.
Sur un mode carressant dont je ne parviens jamais à savoir s’il est dû aux limites de son organe vocal ou à une vraie esthétique, Soko sort un album qui aurait pu être folk, dans la veine d’une Catpower, si Soko n’était hantée par des démons rock qui rappellent parfois Jeff Buckley, parfois Elliott Smith et qui pointent comme une pichenette au milieu des carresses
Sur une trame mélodique généralement déjà bien torchée (genre de mélodie qu’on retient ici par la trouvaille mélodique, là par le gimmick) essentiellement portée par une guitare sourde en arpèges et sa voix plaintive, viennent s’immiscer de subtils arrangements – cordes, piano, réverbération, choeurs – qui font parfois penser à Leonard Cohen pour la référence historique, Andrew Bird ou Kimya Dawson et Feist pour les artistes contemporains proto ou antifolks.
On sent que le disque est ambitieux, camouflé derrière une apparente intimité de façade. Il n’est jamais impudique ni même grandiloquent intello ou bravache, qualificatifs qu’on accole souvent à la musique de hipster bobo. I thought i was an alien est un album de fin de soirée, quand on rumine des idées noires à l’heure où d’autres vont se coucher, quand certains se couchent au pied du lit pour la prière vespérale, quand les coeurs qui saignent se remémorent les chers absents, et les jours heureux qui ont disparu.
I thought I Was an alien avait une coquille médiatique, taillée pour me déplaire. L’écoute m’a détrompé, ne serait le mode uniforme de la voix. I thougt i was an alien s’en ira haut dans les disques qui feront mon 2012. Distruction of the disgusting ugly hate, onzième plage, réussit même à décrocher ma palme, parfait équilibre de toutes les forces de l’album dans un très PJ Harvey -ien titre.
Donc bon si comme moi tu aurais bien cassé des goûts de bobo hipster, te voilà pour tes frais. Soko c’est l’habit qui ne fait pas le moine mais dans le bon sens du terme. Soko c’est la chuchoteuse française qui te prouve que Carla Bruni n’a pas l’ombre d’un demi talent au chant. Soko, c’est bien.
I am Chuck No… euh Denis and I approve this album.
Denis Verloes
Tracklist
Date de sortie: 20 février 2012
Label: Because / Warner
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L’espace Myspace
I thougt I was an alien