Rien de mieux que des artistes qui ne vous donnent pas exactement ce que vous attendiez. Ainsi, ce deuxième album des anglais de Mount Kimbie oblige-t-il à jeter un regard un peu, différent sur le jeune duo qu’on fit fer de lance du genre, dusbtep le temps de leur premier album paru il y a trois ans. Entre ambient, électro, colorations hip hop et rythmiques sautillantes, Crooks & Lovers, résumait, il est vrai, de manière limpide les fondamentaux d’un style déjà illustré par Burial et dont James Blake devint le passeur grand public.
Sans renier le genre qui les fit connaître mais peu enclin à reconduire, la même formule,, Dominic Maker et Kai Compos bougent sensiblement les lignes sur ce Cold Spring, Fautless Youth. Travail, des textures sonores, production élaborée et apparition notable du chant dans un petit monde hier abonné aux courts instrumentaux séduisants mais menacés, par la volatilité confèrent une nouvelle richesse aux nouvelles aventures des jeunes londoniens.
Décollant leur étiquette R&B et dance mais sans jamais abandonner leur groove naturel, le duo explore des contrées plus larges, reflet de leurs mille passions musicales, allant autant du jazz de haute volée à la, Coltrane ou Charlie Mingus (So Many Times, So Many Ways), l’abstract hip hop (Slow), que du côté de l’ambient atmosphérique d’obédience Four Tet ou Boards Of Canada, groupe par ailleurs voisins de label chez Warp Records (Break Well).
D.’humeur moins solaire et plus changeante, les Mount Kimbie s’exposent plus,, font enfin entendre leurs voix, soufflent le chaud (Made To Stray et Blood And Form, parfaites bombes expérimentalo-pop) et le froid (les paysages électro glacés de Liar Near ou Sullen Ground) déroulant, au gré de leurs envies un film sonore et urbain dont l’auditeur fabrique sans le moindre mal ses, propres images.
Une mue toute entière résumée par la présence sur les titres-phares You Took Your Time et Meter, Pale, Tone de l’invité King Krule dont le slam grave et rageur rappelle assez la démarche du Massive Attack des grandes heures qui, par la voix du jeune Tricky, personnifiait la violence froide et la noirceur du trip hop alors débutant.
Refusant de même d’être limité au territoire du dubstep au risque de se retrouver périmés avec lui, on ne peut que remercier ce Mount Kimbie au visage plus grave et à la production plus austère mais plus mémorable,, d’ainsi hausser avec éclat leurs ambitions.
l’air de rien, ce disque changeant et exigeant, qui nécessite une lente acclimatation mais dont chaque réécoute bonifie la réception, est une des bonnes surprises du moment. Pour un, « printemps froid », on le confirme, mais pas moins passionnant pour autant.
Franck Rousselot
Mount Kimbie – Cold Spring Faultless Youth
Label : Warp Records
Date de sortie : 27 mai 2013