Choisir 5, 10, 15 ou 20 films, ou plus encore, c’est réduire sa propre vision du cinéma à l’essentiel. C’est faire des choix difficiles pour faire comprendre au mieux nos goûts et nos sensibilités, sans prétention aucune, sans asséner aucune vérité car nous avons tous des coups de cœur différents, des œuvres d’art qui s’imposent à nous comme des fulgurances, autrement dit des oeuvres de chevet pour simplifier le principe.
10 films de chevet de Benoît Richard
Buffet froid, de Bertrand Blier (1979)
Je ne connaissais pas le cinéma de Blier avant de voir Buffet froid. Dans les années 80, je n’allais pas voir ses films en salle parce qu’ils ne correspondaient pas vraiment aux films de mon âge. Je crois que c’est donc avec celui-ci que j’ai fait connaissance avec son univers. Et quel choc ! Voir à 16 ans Blier et Depardieu (deux acteurs que j’adorais !) dans un film aussi drôle, aussi glauque et absurde à la fois que celui-ci, on ne s’en remet pas comme ça. Même « Les valseuses », vu après, n’aura pas été un tel choc. Aujourd’hui, avec le recul, ce film me laisse l’image d’un Paris de la fin des 70’s assez triste, post-moderne, en construction… Il y a presque une dimension sociologique dans Buffet froid.
Un singe en hiver, d’Henri Verneuil (1962)
C’est sans aucun doute le film que j’ai le plus vu de toute ma vie. Des dizaines de fois. A l’époque, avec un copain, on se le passait une fois pas semaine. On connaissait les dialogues par cœur. Pourquoi ? Parce que c’est sans doute le meilleur film de Verneuil, parce qu’on y trouve les meilleurs dialogues d’Audiard et qu’il se dégage de cette adaptation du roman d’Antoine Blondin, derrière le côté comique avec notamment le duo d’acteurs Gabin / Belmondo, une belle et profonde mélancolie et bien plus encore…
Pulp fiction, de Quentin Tarantino (1994)
Le film sort en octobre 1994, après avoir été recomposé de la Palme d’or quelques mois plus tôt par un jury cannois présidé par Clint Eastwood. On s’attend à un truc énorme et c’est effectivement énorme. Jamais avant ce film on n’avait vu une telle science du découpage et du montage mise au service d’un film aussi barré, drôle, absurde et bien écrit. Si « Reservoir Dogs » fut déjà une claque à sa sortie deux ans plus tôt, avec Pulp fiction Tarantino entrait définitivement dans le cercle très fermé des auteurs de films à la fois cultes et populaires.
L’armée des ombres, de Jean-Pierre Melville (1969)
Je crois bien que c’est le film sur la guerre 39-45 qui m’a fichu le plus la trouille. J’ai du rêvé plusieurs fois que je courrais avec Lino Ventura dans cette sinistre couloir qui n’en finissait pas pour échapper aux balles des soldats allemands. Au-delà de ce souvenir, je pense que ça reste un des grands films traitant de l’occupation avec « Mr Klein » que j’ai d’ailleurs failli mettre dans cette liste et dans une moindre mesure, « Lacombe Lucien ». Mais là, à chaque fois que je revois ce film, il me scotche, me terrifie comme aucun film d’horreur de l’a jamais fait.
Voyage à deux, de Stanley Donen (1967)
Pour moi c’est le « Chef-d’oeuvre absolu » de Stanley Donen ! Si je n’aime pas trop la partie « comédie musicale » de son oeuvre, (en fait, je dois vous avouer que je ne supporte pas les comédies musicales) en revanche, je trouve ses mélos absolument délicieux. Celui-ci plus particulièrement. Voyage à deux est un film bouleversant, magnifique, émouvant, fascinant, un film qui parle de la vie du couple comme rarement on l’a vu au cinéma. Un film plein de mélancolie, un film sur la fuite des sentiments, sur le temps qui passe et dans lequel Audrey Hepburn et d’une beauté à tomber par terre !!
Marion, de Manuel Poirier (1997)
En, fait, je pourrais citer tous les films de Manuel Poirier, un cinéaste pour lequel je voue une grande admiration. Si, « A la campagne… » fut une révélation pour moi à sa sortie en 1995, je dois dire que Poirier m’a rarement déçu par la suite. Marion arrive juste avant « Western » film avec lequel Poirier va connaitre le succès. « Marion » raconte comment un couple de bourgeois parisiens en vacances dans leur résidence secondaire, tentent de s’approprier la fille d’une couple d’ouvriers. Comme souvent chez Poirier, ça sonne incroyablement juste, c’est plein d’humanisme, c’est bouleversant avec là, en plus, une Marie-France Pisier splendide, dans un de ses derniers grands rôles au cinéma. Comme Les Dardenne, Poirier s’avère être un formidable observateur des comportements humains.
Memories of Murder, de Bong Joon-Ho (2003)
Globalement j’adore le cinéma de genre coréen, Le polar, le thriller sont des genres dans lesquels ils sont peut être les derniers à exceller et à renouveler un tant soit peu le genre, au vu de ce qu’ils ont montré ces derniers années « Memories of Murder » en est l’exemple parfait. Le film nous plonge dans une Corée étrange et intemporelle, jouant beaucoup sur les éléments naturels (la pluie, la forêt…). On est saisi par l’ambiance, par le jeu des acteurs, par le côté à la fois sordide et totalement saisissant de l’histoire ; et tout ça filmé avec une grande maîtrise. Une grosse claque et un classique à tout jamais.
De Sang Froid, de Richard Brooks (1967)
Je l’ai vu dans un cycle au « cinéma de minuit » je crois bien. Ce film m’avait lui aussi fait froid dans le dos de son traitement, de par son aspect clinique et dénué de toute émotion. Je n’ai jamais lu le livre de Truman Capote mais ce film en tout cas en est une brillante adaptation. Jamais un fait divers aussi atroce n’aura été raconté avec autant de réalisme et de détachement que dans ce film. « De Sang Froid » est un grand film sur l’Amérique, sur l’errance, sur la peine de mort, sur la famille… et c’est surtout une petite merveille de cinéma !
C’est arrivé près de chez vous, de R. Belvaux, A. Bonzel et B.Poelvoorde (1992)
C’est le classique des classiques en matière de film culte des années 90 : dialogues archi rabâchées, (il suffit de voir la page Wikipedia du film ou sur youtube pour s’en rendre compte), ce film reste un ovni à tout point de vue avec un Benoît Poelvoorde énorme, passé depuis à des choses nettement plus consensuelles. Malgré son côté ultra évident, je tenais à citer ce film parce que je me dis que, mine de rien, depuis (soit presque 20 ans) on n’a pas eu grand chose à se mettre sous la dent dans le genre grosse déconne, film ovni, fauché et sorti de nulle part.
American Splendor, de Shari Springer Berman et Robert Pulcini (2003)
Un film qui parle de bande dessinée et qui le fait bien : c’est rare ! Du coup difficile d’oublier un film comme celui-ci. « American Splendor » raconte l’histoire d’Harvey Pekar, un dessinateur indé américain pas aussi connu que Robert Crumb, mais tout aussi fort, je trouve. Inspiré de ses livres, le film raconte la vie de cet auteur, son existence minable, ses échecs et ses névroses. Dis comme à ça, ça ne fait pas forcément envie, mais mis en scène par Shari Springer Berman et Robert Pulcini, et avec Paul Giamatti dans le rôle principal, ça donne un film du tonnerre , bourré, d’humour, de tendresse et d’humanisme.
tsss tsss…confondre Yves Montand et Lino Ventura ! M. Benoit, je ne vous félicite pas !
honte à moi, je vais me flageller de ce pas avec une poignée d’orties bien fraîches… et surtout corriger cette erreur. En tout cas tu es le seul à l’avoir notifiée. bravo !
en tout cas, un grand film qui a donné la musique des Dossiers de l’Ecran. eh oui !