Cuba, 1958. Le président Batista ne sait pas que sa dictature n’a plus que quelques mois à vivre avant d’être balayée par la révolution castriste l’année suivante. Alors que le pays est gangrené par la corruption et les trafics en tous genres, l’ami personnel d’un baron de la drogue est tué dans un guet-apens monté par deux membres de la guérilla dont un y laisse la vie. Quelques jours auparavant, le jeune Joaquin, employé dans un luxueux hôtel de La Havane, ne savait pas encore qu’il se retrouverait entraîné malgré lui dans cette affaire, le survivant du guet-apens, gravement blessé, n’étant autre que son frère ainé Carlos »Car quand on provoque le Señor Trafficante, il est préférable de ne pas avoir de famille »
D’emblée on est séduit par l’élégante ligne claire et les couleurs vives et chaudes de ce polar vintage, dont l’action se déroule entre Cuba et le sud des Etats-Unis dans les années 50. Le fait de situer l’histoire quelques mois avant l’arrivée de Fidel Castro confère à l’ouvrage un caractère historique sans pour autant en faire un plaidoyer politique, et ne peut s’expliquer que pour les besoins du scénario. En effet, Cuba à cette époque n’était encore que la poule de luxe exotique des Etats-Unis voisins, sorte d’appendice sulfureux du rêve américain. Fidel Castro n’avait pas encore tiré le rideau de fer qui allait mettre sous cloche le pays pendant plusieurs décennies, sans doute le prix à payer pour éradiquer toutes les tares d’un capitalisme queutard à pompes en croco, accro à la « perico » (la cocaïne en argot cubain). Quant aux rutilantes limousines, magnifiquement dessinées par Philippe Berthet, elles n’étaient pas encore devenues les reliques tenaces d’un passé clinquant et faussement glorieux.
Cette série noire, plutôt classique et très léchée dans la forme, bénéficie d’un scénario parfaitement huilé au suspense haletant. Signé du prolifique Régis Hautière, il joue sur le contraste entre le quasi tout-puissant baron de la drogue Señor Trafficante et le jeune Joaquin issu des quartiers pauvres, qui doit fuir avec une valise de biffetons aussi encombrante qu’émancipatrice, le faisant passer brutalement de l’adolescence à l’âge adulte. Preuve indéniable de l’objectif atteint, on referme le livre avec l’envie de connaître la seconde partie de ce diptyque.
Laurent Proudhon
Perico – Tome 1
scénario : Régis Hautière
Dessin : Philippe Berthet
Editeur : Dargaud
64 pages- 14,99€¬
Parution : 7 février 2014
Si vous ouvrez ce super polar très bien scénarisé et au dessin magnifique, vous ne pourrez plus le refermer avant la dernière page. Et dire qu’une deuxième partie et annoncée !!! Courrez l’acheter et le lire et offrez le vite ! Bonne lecture !