Avec ses airs de ne pas y toucher, ce premier album d’Acquaintances est un des albums »rock » de ce début d’année, rappelant le meilleur de Sonic Youth et Sebadoh. Rien que ça !
Attention, Acquaintances est un nouveau groupe mais ses membres ne le sont pas. Issus de la scène de Chicago, ils ont même roulé sacrément leur bosse. Ce quintet se compose en effet de Jered Gummere (The Ponys, Bare Mutants), Patrick Morris (Don Caballero, The Poison Arrows), Stephen Schmidt (Thumbnail, Chino Horde, Avenue Boulevard), Justin Sinkovitch (The Poison Arrows, Atombombpocketknife, Thumbnail) et Chris Wilson (Ted Leo and the Pharmacists, Shake Ray Turbine).
Bénéficiant de trois guitares, cet album est placé sous le sceau de la Sainte- Six cordes, fussent-elles préparée, bourrée d’effet, dissonante, saturée. Les Américains aiment éperdument les guitares. Et ce ne sera pas une surprise de constater que le groupe, se place largement dans la filiation très 90’s des grands groupes noise rock US de l’époque. On ne sera pas étonné non plus de retrouver des similitudes avec Sonic Youth, y compris dans les timbres de ses chanteurs, (Bacherlor’s grave comme exemple le plus frappant). Pourtant, cette filiation n’est pas gênante. D’abord car elle est hautement recommandable. Ensuite car, à l’instar de la bande à Thurston, elle est composite (rock, punk, garage, noise, blues, pop) et sur cette base, chacun concocte sa propre sauce, s’amusant à déstructurer et à troubler les motifs du genre. Enfin, car Acquaintances se la joue modeste et éternellement jouisseur,, ne, se reposant jamais sur ses seuls tripatouillages sonores et sur cet amour immodéré pour les strates de guitares dissonantes qui, se plaisent à déborder du cadre et engluer l’espace sonore (skin, titre le plus lourd et collant du disque, et vraie réussite). A l’opposé de l’album concept et expérimental, le disque reste de bout en bout, percutant, »distrayant » si on ose employer l’adjectif. On sent toujours la patte d’un groupe de copains venus avant tout et essentiellement envoyés de bons morceaux de rock. D’où son pouvoir de joie »addictive » voire régressive pour ceux qui ont été baignés et façonnés par le rock indé des années 90.
Il faut dire que Acquaintances aime les grandes mélodies malades, et derrière la force affichée et parfois assénée, on sent toujours poindre une fêlure qui rend d’autant plus touchante la musique. Sebadoh était passé maître dans cette drôle d’ambivalence et de fragilité électrique. Et Acquaintances lui emboîte le pas dans un disque qui enchaine sans sourciller les bons morceaux. Que demander de plus ? Rien, si ce n’est à ces diables d’Américains de continuer comme ça.
Denis Zorgniotti
Date de sortie : 3 février 2014
Label : Epitonic
PLus+
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