Ami lecteur, il est 8h54, tu investis ta cuisine d’une charentaise molle, le cheveu hirsute et l’humeur maussade. Dans un demi-sommeil, tu ne sais pas encore qu’on est vendredi, lorsqu’au dernier †œploc† de la cafetière, elle arrive, la voix de François Morel, dont la chronique va enjoliver toute ta journée. Je m’adresse là aux plus oisifs d’entre vous. Mais pensons aussi à tous ceux qui, à 8h55, sont déjà au bureau, penchés sur le dossier Dugommier. Et à ceux qui ont envie de voir si le Morel, c’est aussi bien à l’écrit qu’à l’oral.
Eh bien oui. Après †œL’air de rien†pour une première cuvée, †œJe veux être futile à la France† réunit ses billets de 2011 à 2013. Ce n’est pas sur le terrain politique que je préfère François. Ce rire-là , il se gagne un peu trop facilement. Non, c’est lorsqu’il prend les armes contre la tarte au citron déstructurée ou, qu’il salue le retour du fromage sur la table de l’Elysée que sa douce ironie nous enchante. Quand il rend hommage à Sempé, l’enfant le plus célèbre de Saint-Georges-des-Groseillers se place dans le sillage du †œpère† de tous les chroniqueurs, Alexandre Vialatte.
Il ne faudrait pas omettre la fonction éminemment didactique de ces textes. En effet, vous apprendrez par exemple qu’une Putéolienne †œn’est pas une personne de mauvaise vie énergiquement renouvelable† mais une habitante de Puteaux, ou qu’il existe un tire-bouchon baptisé Charles De Gaulle, parce qu’il lève ses bras sur les côtés comme le général.
Enfin, grâce à lui, feu André Chaumeau, acteur de second rôle à la filmographie pourtant impressionnante, aura tenu un matin sur les ondes le haut de l’affiche.
Pour ce soin que vous prenez, cher François, à voler au-dessus de la rigolade normative, à être grave et léger tout à la fois, soyez remercié.
Brigitte Tissot
Je veux être futile à la France
Chroniques 2011-2013
Editeur : Denoël
279 pages – Prix : 18 euros
Parution : décembre 2013
9 mars 2012 : dans l’actualité, on parle de supprimer l’appellation †œMademoiselle†.
†œQue les femmes, toute la vie, restent des demoiselles, que jamais elles ne deviennent des †œmadame† (« ).Parce que mademoiselle, c’est la gaieté, c’est la jeunesse, c’est l’insouciance. Crinoline et balançoires, promesses et roses du printemps, robes fleuries et airs du faubourg, serments d’amour, joues roses et regards intimidés. Mademoiselle, c’est l’audace et la fragilité, c’est le courage et la vertu, la transparence et les secrets du coeur.
Madame, c’est l’appartement, la maison de campagne, les manteaux, les bijoux, les traites, les amants. Madame, c’est l’ennui, c’est le renoncement.
Franchement, vous voudriez refaire votre vie avec mam’zelle Clio ou avec Madame Figaro ?
Que les femmes jamais ne deviennent des †œmadame†, que les †œmademoiselle† continuent d’éclairer nos jours, d’illuminer nos nuits.
Mademoiselle, s’il vous plaît, n’écoutez pas les sirènes de la triste normativité, du conformisme austère, restez légère, imprévisible et désinvolte.
Ne mourez pas.†