Voilà bien le genre d’album qui ne touchera qu’une poignée d’auditeurs mais ceux-ci risquent d’être conquis par l’univers de ces étranges Suisses.
L’intérêt du webzine (Benzinemag mais aussi tous les autres qui se reconnaîtront) prend alors tout son sens : parler d’un album confidentiel qui, faute de place, de genre défini et de poids commercial, serait ignoré par la presse traditionnelle. Il faut dire que Black Fluo n’y met pas du sien : ils viennent de Chiasso, de cette Suisse italienne finalement méconnue ; ils pratiquent une musique lente et largement instrumentale et last but not least, ils proposent leur album dans une version collector avec un livre conceptuel de 360 pages, incasable dans votre colonne à CD Ikea.
…Mais vous pouvez acheter la version MP3. Et puis, s’il est difficile de répertorier par une dénomination simple la musique de Black Fluo, celle-ci n’est pas si hermétique et si difficile d’accès. Les Suisses arrivent à dessiner des atmosphères parlant plus , la fibre émotionnelle qu’à l’intellect., La fin, , le premier titre de l’album, semble s’inspirer d’un thème de musique ancienne qui serait pervertie par une électronique d’ambiance. On y entend le fil d’une guitare, un violoncelle mélancolique, le souffle du vent…Il s’agit là d’une possible musique de film qui vous emmène dans la lande au couchant, avec tristesse et noirceur ; un double sentiment qui traverse le disque et lui donne à la fois sa vision déformée et son équilibre. La suite , verra le retour de la voix : une voix d’homme parlée de romantique anglais, de femme murmurant dans une confusion enivrante, d’homme chantant à la lune la noirceur d’une ballade crépusculaire. Black Fluo devient le point de rencontre entre la new wave arty et théâtrale d’And Also the Trees (Death of the Sun),, la noise sensible de Meanwhile back in Communist Russia (Narcosia), un post-rock particulièrement atmosphérique. Tous les morceaux ont en commun de mélanger une noirceur profondément diffuse, des accords flottants et des lignes de mélodies résonnantes et finalement belles. Le flou, la distorsion visuelle et les traces lumineuses qui vous permettent d’arriver à bon port. Magnifique voyage.
Denis Zorgniotti
Label : Pulver and Asche records
Date de sortie : 1e juin 2014