Écouter le premier album de The Vacant Lots, sur un véritable label s’entend, c’est accepter le postulat suivant : le rock s’écrit avec deux accords, trois tout au plus, en mode feignasse extrême à faire passer les frères Reid (The Jesus and Mary Chain) pour des Stakhanovistes et surtout avec une bonne dose de produits illicites sensés ouvrir les chakras ainsi que les portes de la perception. Une fois ce postulat accepté, pour apprécier » Departure, » il va vous falloir aussi en accepter un autre, : qu’en matière de rock, américain et autre, entre la sortie du premier Velvet Underground et au-delà du premier album de Suicide, il ne s’est rien passé d’intéressant. Hormis peut-être le « Psychocandy, » de Jesus & Mary Chain.
Maintenant que vous êtes prévenus, que vous savez sur quel terrain vous allez vous aventurer, vous pouvez écouter et apprécier » Departure, » en toute tranquillité. Mais bon, autant vous mettre au jus dès le début :passé l’entrée en matière psyché/rock/pop/tubesque » Mad mary jones, » assez enlevé puis le très Spiritualized » Never satisfied, » le groupe déroule un rock néo-psychédélique relativement convenu et somme toute efficace, similaire à celui d’un Dead Meadow, Warlocks ou encore White Hills. Bref, un néo-psychédélisme d’où semble exclue l’originalité tant les balises sont identifiables dès la première écoute.
Pourtant originalité il y a parfois. Par exemple sur le très eighties » Paint this city, » dans lequel vous avez l’impression d’écouter le » Take my breathe away, » de Berlin via la vision d’un paranoîaque. Ou encore dans leur relecture de la discographie du Velvet, assez surréaliste. Celle-ci paraît se limiter à seulement quatre titres, : » All tomorrow’s parties, » » Foggy notion, » » Sister ray, » et » The gift, « . Et encore, le duo américain est tellement peu adepte de l’effort qu’il a préféré réunir les deux derniers titres sur un » Make the connection, » complètement hypnotique.
Mais, passé ces détails, le problème reste toujours le même : on navigue en terrain connu. Très connu. Et ce n’est pas la production de l’ex-Spacemen 3, Sonic Boom, adepte notoire des drogues en tout genre et de la musique qui va avec, qui va changer la donne, au contraire. Elle épaissit les guitares, donne de l’ampleur à la musique de The Vacant Lots voire de l’assurance mais elle paraît surtout écraser la personnalité du groupe. Il suffit pour cela de jeter une oreille aux anciens albums auto-produits pour s’en rendre compte, : plus sales, plus lo-fi, ne se limitant pas seulement au psychédélisme pachydermique mais puisant ses racines vers le post-punk, l’indie-rock slacker des 90’s ou le rock crade des sixties pour un résultat certes imparfait, plus fragile mais non moins intéressant.
Il faut donc voir » Departure, » comme ce qu’il laisse paraître : une porte d’entrée à l’univers de The Vacant Lots, un album simple, accessible mais ne reflétant en rien la personnalité du groupe. On attendra donc le prochain album pour véritablement juger sur pièce la musique de The Vacant Lots. En attendant si vous recherchez un album de psyché bien foutu mais convenu n’hésitez pas, jetez vous sur » departure, » il devrait pouvoir vous faire tenir jusqu’au prochain Bardo Pond ou Spiritualized par exemple.
Christophe Ciccoli
The Vacant Lots – Departure
label : Sonic cathedrla
Sortie : 7 juillet 2014