Mini-chronique pour un mini-L.P. C.’est un peu fumiste comme concept mais je n’ai qu’une heure devant moi (conception, rédaction, relecture) pour te livrer mon ressenti sur Safe Travel, nouvel opus de My Name Is Nobody. En gros »je résume le propos à suivre : Oh putain que c’est beau !
Jusqu’à présent, hors du cadre musical donc, My Name Is Nobody, c’est pour moi :
– Terence Hill et Henry Fonda (B.O. Ennio Morricone).
– Jim Jarmusch et Dead Man.
– Ulysse se jouant du benêt Polyphème.
Dans quoi je m’embarque ! Allez »Oublie Sergio Leone... enfin… pas complètement… et concentre-toi sur les déambulations mystiques et merveilleuses de Bill Blake et son copain peau-rouge Nobody dans les forêts de séquoias géants, concentre-toi également sur l’immensité liquide et l’invitation au voyage d’un chant de l’Odyssée, cette splendide et insoupçonnée carte de navigation. Je te parle d’immensité liquide parce que Safe Travel a été enregistré à Chicago et vogue carrément sur les eaux du majestueux Michigan (mis à l’honneur dans le visuel topographique de l’album). Écoute, tu comprendras.
C.’est lent, très lent, tu entends les cordes couiner sous le glissement des doigts. Comme grince la coque d’un cargo claustro chahuté. C.’est très lourd aussi, très pesant, très grave au sens propre du terme, bas dans la gamme, à l’image de la voix monotone et traînante »façon Nick Cave ou Stuart Staples« et de cette fichue guitare baryton qui donne à l’ensemble une mélancolie toute américaine. Pour le coup, quand la mélodie s’ouvre au souffle du piano, des violons et autres somptueux choeurs dignes de Stufjan Steven et bah tu te retrouves dans la plaine infinie. Plaine infinie = immensité liquide ici. Tu penses à Sparklehorse tiens ! Le son est drapé d’une reverb de saloon vide, tu es attablé seul dans la salle rococo sentant le vieux tabac et la bière, le Bad Orchestra joue pour toi sur la vieille scène en bois. à‡a te fiche des flashs cette musique !
Ces cinq morceaux sont un magnifique conte de l’ouest. Ils pourraient être la B.O. de Dead Man si Neil Young ne l’avait pas déjà et si merveilleusement composée, ils pourraient être la B.O. de Silent Tongue (Le Gardien Des Esprits), western halluciné du grand Sam Shepard, dernier ou avant dernier rôle du non moins génial River Phoenix. Tu connais ce film ? Le jeune cow-boy Talbot Roe qui veille le cadavre de sa jeune épouse indienne sous un arbre, qui pour rien au monde ne veut s’en séparer »jusqu’à la folie »à pleurer ce film. Safe Travel m’évoque ça… paradoxalement…
Oh putain que c’est beau !
Stéphane Monnot
My Name Is Nobody – Safe Travel
Label : My Little Cab Records
Sortie : 17 novembre 2014