Une adaptation du roman culte de Mary Shelley, qui reprend l’histoire là où l’écrivaine britannique l’avait laissée. C.’est ainsi que l’on retrouve le monstre de Frankenstein travaillant comme bête de foire dans un cirque. Comment en est-il arrivé là ? Celui-ci commence à raconter ce qu’il advint de lui alors qu’il cherchait à se donner la mort, en vain, pourchassé par le fantôme de son créateur dans un paysage glacé et désertique.
Il n’y a pas grand-chose à redire à ce sequel comics qui se laissera lire très volontiers par quiconque aura apprécié comme moi le roman de Mary Shelley. Vieux routier de la BD d’horreur U.S., Bernie Wrightson réussit à nous éblouir pas son trait au fusain noir et blanc, qui compense un certain académisme grand guignol par un luxe de détails impressionnant. Sa patte comics respecte plutôt bien l’esprit du roman et son ambiance sombre et inquiétante. Les pleines pages représentant la bibliothèque et surtout le laboratoire du docteur Ingles sont littéralement époustouflantes, un laboratoire dantesque et poussiéreux surchargé de monstres empaillés, squelettes menaçants, embryons difformes en bocaux, totems primitifs et autres piles de crânes humains. Du grand art.
Quant à l’histoire, elle est assez prenante même si dans cette première partie Steve Niles semble reprendre plus ou moins la trame de l’original. Le docteur Frankenstein, tenu pour mort, est remplacé ici par le docteur Ingles, qui, comme son prédécesseur, s’est pris de passion pour les arcanes de l’alchimie et de la création. l’originalité réside au début du récit dans le nouveau statut du monstre en tant que bête de foire au sein du cirque lui servant de refuge, avec certaines scènes évoquant Freaks. Si l’on pressent que la situation tournera mal, il faudra attendre le tome 2 pour en avoir confirmation, l’auteur passant dès la page sept en mode flashback, imaginant le prolongement immédiat du roman de Shelley. De la même façon, la tonalité littéraire du texte s’accorde bien avec le récit original.
Si cette production n’a certes rien de révolutionnaire, il m’est impossible de nier le talent de son auteur, moi qui en plus ne suis pas versé dans les comics US. Il y a même un côté désuet qui ne fait que contribuer au charme de cette histoire. Comme pour la cuisine, on peut être à l’affut de recettes innovantes, mais on peut parfois prendre le plus grand plaisir à déguster un plat traditionnel.
Laurent Proudhon
Frankenstein t.1 : Le monstre est vivant
Scénario : Steve NilesDessin : Bernie Wrightson
Editeur : Soleil
72 pages – 15,95 €¬
Parution : 5 novembre 2014