Suite à une discussion, le journaliste Eric Aeschimann et l’auteur de bandes dessinées Nicoby décident de partir à la rencontre des anciens du journal Pilote pour évoquer leurs souvenirs mais plus aussi et surtout pour parler des années 1968 à 1972 et de cette fameuse réunion durant laquelle René Goscinny fut pris à partie par bon nombre de dessinateurs désireux de faire souffler le vent du changement au sein de la rédaction.
En 1968, en pleine période d’insurrection, alors que la jeunesse se révolte à Paris, les auteurs du journal Pilote décident donc eux aussi de faire leur révolution et de régler son compte au rédacteur en chef, René Goscinny, durant une réunion qui restera mythique dans l’histoire de la bande dessinée.
Plus de 45 ans après les faits, les deux auteurs ont rencontré Gotlib, Mandryka, Giraud, Druillet, Fred et Brétécher pour leur demander, entre deux questions, mine de rien, ce qui s’était vraiment passé lors de cette fameuse réunion en forme de tribunal. Chacun y va alors de se souvenirs, de ses impressions pour reconnaître au final que Goscinny était un grand monsieur. Malheureusement, cette réunion fut le début de la fin pour le Journal Pilote qui vit l’implosion de sa rédaction. Quelques temps après, la plupart quittèrent le journal et partirent fonder Métal Hurlant, Fluide glacial ou l’écho des savanes.
Plus qu’une BD reportage, c’est un véritable hommage aux fondateurs de la bande dessinée moderne que nous offrent là Nicoby et Aeschimann. A travers ces 6 rencontres, ces 6 interviews, on se (re)plonge dans une époque incroyablement foisonnante qui vit naitre la plupart des grands noms de la BD française pour les deux décennies suivantes. On y apprend des tas d’anecdotes sur le fonctionnement du journal l’époque, sur les rapports que les dessinateurs pouvaient avoir entre eux et sur ceux qu’ils entretenaient avec le patron, René Goscinny. Tout ça est raconté à la fois très sérieusement et en même temps avec beaucoup de recul par un Nicoby qui ne manque jamais d’apporter une touche d’humour et de dérision à ces passionnantes discussions qui sont aussi, en filigrane, des portraits d’artistes hors du commun qui ont changé la BD.
Une belle idée en tout cas que ce projet qui aura au moins le mérite de rappeler combien Pilote fut un journal novateur et reste encore aujourd’hui une référence pour tous les amoureux de bande dessinée.
Benoit RICHARD