Avec seulement un album au compteur, l’immense Leviathan, Flavien Berger a dessiné les contours d’un univers extrêmement inventif, mélangeant expérimentations musicales et textes poétiques. Pour aller plus loin, on lui a demandé de nous parler de ses influences, de ses disques de chevet et de ses coups de cœur du moment.
5 disques du moment :
Mdou Moctar – Anar
J’ai eu la chance de le voir jouer en suisse au Leysin festival, programmé par mon couz’ Buvette, et j’ai pris une des plus grosses claques de ma vie. C’est un touareg guitar hero, il est très classe. J’aime tout dans sa musique, qui n’est que peu influencée par une contemporanéité, et quand elle l’est, c’est pour des bonnes raisons. Je lui ai donné mon album, je ne sais pas s’il l’a écouté, je me demande comment ses oreilles peuvent réagir face à ma musique.
Malcolm Cecil – Radiance
Il y a des cascades d’or, des ovnis couleur océan et des licornes qui irradient. C’est une carte d’un monde où l’on communique avec les anges, une des plus belles pochettes de vinyle de l’histoire. C’est une perle d’un nouvel âge. C’est un œuvre qui m’inspire car c’est comme si elle venait d’un autre monde. Son thème permet de s’imaginer beaucoup de choses, et les matières sonores sont presque tangibles. C’est de la lumière en disque. On y parle de vent, de soleil, de vibrations et d’aube.
Julee Cruise – Floating Into The Night
Musique romantico-brumeuse, c’est Twin Peaks en album, le trio en infernal, ballade amoureuse pour psychotique américain. Je retiens l’ambiance qui est installée par cette musique de montagne. C’est triste mais ce n’est pas triste, c’est mutant.
Palmbomen II – Palmbomen II
C’est une des meilleures sorties de cette année selon moi. Pur production sur bandes. Des tracks progressifs avec un super groove et un méga choix d’instruments. C’est acid mais doux je trouve, les sons, les filtres, les accidents, font ressurgir des émotions enfouies. J’ai fait une crise de joie quand j’ai découvert ce travail.
Meridien Brothers – Desesperanza
Je rêve de le rencontrer. Je pense que nos démarches de recherches musicales se ressemblent un petit peu. C’est de la cumbia déréglée, un film de zombie mal doublé, de la super série Z, très bien produite. J’ai beaucoup d’images et d’ambiances qui me viennent à l’écoute de ces scènes d’aventures décadentes.
5 disques pour toujours :
Bill Evans Trio – Sunday at the village Vanguard
C’est un enregistrement live au Village Vanguard, ils écrivent l’histoire de la musique. On entend des gens parler et des assiettes s’empiler au loin. Scott LaFaro à la contrebasse, Paul Motian à la batterie et Bill Evans au piano. Les trois improvisent simultanément, il en ressort de l’énergie en cascade. C’est typiquement un disque que j’ai découvert grâce à mon père. Il m’apaise, je l’écoute beaucoup. Le jeu de Bill Evans est encore un mystère pour moi. C’est dimanche, on déjeune en famille sous des tentes, on est déjà un peu bourré.
Däm-Funk – Colors
La vision que j’ai de Dâm-Funk c’est celle d’un adolescent éternel, qui même dans le plus grand des studios, sera encore en train de faire des chansons dans sa chambre. Stones Throw est un super label, qui sait se réinventer, c’est pour moi un des meilleurs en Amérique.
Didier Marouani – Temps X
C’est en premier lieu un générique d’émission télévisée sur l’espace et la science-fiction. Didier Marouani c’est un cow-boy de la musique électronique française des années 80, une mega super-star en Russie, mais pas vraiment connu de grand public en France. La pochette de ce disque a inspirée celle de mon premier EP, « Glitter Gaze ».
D’angelo – Voodoo
Un groove mystique. C’est celui que je cite beaucoup, tout simplement parce qu’il m’a d’abord bercé adolescent, puis il est devenu un enseignement pour le jeune adulte apprenti musicien que je suis. Tout me plaît l’approche du thème, la place de la voix et du texte, les arrangements, la production, la couleur, la chaleur, la manière dont il parle directement au bas du ventre. C’est le disque que je mets sur la platine quand j’ai bu trop de vin.
György Ligeti – Lux Aeterna
J’y reviens souvent. Pour me calmer et en même temps ouvrir la porte sur l’espèce de trou noir que le son organisé peu parfois créer. C’est magistral, c’est l’infini de l’espace, c’est comme quand on s’allonge face à la nuit étoilée et qu’on arrive à se figurer comme accroché à la terre face au vide éternel, c’est très beau et très angoissant. J’ai beaucoup d’affection pour la musique religieuse et ouvertement mystique, plus largement.