Avec Tungstène, Marcello Quintanilha signe un polar inspiré de la société brésilienne contemporaine.
Salvador de Bahia est à l’image de la société brésilienne contemporaine : multiple. Sous ses aspects attrayants, son soleil et sa mer pure et claire, le moindre grain de sable peut enrayer la paisible machine. C’est dans ce décor que Marcello Quintanilha vient planter ses crayons.
Tungstène est l’histoire d’une ville, Salvador de Bahia, qui va voir sa relative quiétude bouleversée par une réaction en chaîne d’événements imprévus. Une pêche à la dynamite au pied du Fort de Notre-Dame de Monte Serrat met le feu aux poudres.
Pourtant, bien que légalement répréhensible, elle ne justifie pas la déferlante d’agressivité à venir qui aura une incidence sur nombre d’individus. À y regarder de plus près, ce microcosme social avec ses trafics, magouilles, la circulation de stupéfiants, la corruption ou encore la violence qui font partie de la vie de la station balnéaire, était déjà prêt à s’enflammer.
Embarqués contre leur gré, quatre habitants vont voir leurs destins s’entrecroiser. Monsieur Ney, un militaire à la retraite, Caju, un minable dealer de marijuana, Richard, un policier excessif et Keira, sa compagne victime de sévices conjugaux autant physiques que psychologiques, auront un avenir lié aux autres sans même le savoir.
Dans ce puzzle narratif rythmé, entrecoupé de flashbacks, chacun d’eux a une face sombre ou un secret à cacher qui nous seront dévoilés au fur et à mesure que l’intrigue avance.
Bien que l’idée initiale soit ambitieuse, l’histoire souffre de passages un peu longs ne servant pas forcément le scénario. On sent la volonté de l’auteur de faire durer le suspense, mais on a la sensation que certains sujets ne sont pas suffisamment explorés alors que d’autres sont nourris de détails qui n’ont aucun impact sur le déroulement de l’action. Le lecteur est spectateur d’une aventure ni vraiment originale ni vraiment inintéressante, mais dont la fin perd en intensité comparée à l’ensemble du récit.
Si l’intrigue n’est pas transcendante, le dessin quant à lui a de l’intérêt. Le trait réaliste de Marcello Quintanilha, les expressions faciales tirées à l’extrême des divers protagonistes et le choix du noir et blanc, mettent parfaitement en avant les tensions entre les individus en situation.
Pourtant, après lecture, ce qui était attirant de prime abord est ce qui reste le plus réussi : l’illustration de couverture. Mystérieuse par le cadrage, idyllique par ses eaux limpides et oppressante par la main armée qui se dévoile, elle ne reflète pas vraiment l’ouvrage.
Simon BAERT
Tungstène
Scénario : Marcello Quintanilha
Dessin : Marcello Quintanilha
Éditeur : Çà et là
186 pages – 20 €
Date de sortie : 24 août 2015
Tungstène – Marcello Quintanilha – Extrait :