Andrea Ferraris exhume, des confins de l’Histoire, une bataille oubliée. Larmes, sang et poussière sont un curieux mélange pour ce western atypique !
L’Histoire a des recoins obscurs, hantés par des massacres, et relégués à l’oubli par des souvenirs sélectifs. Dans son ouvrage Churubusco, Andrea Ferraris a choisi de réhabiliter cette bataille du même nom à travers un récit qui sent la poudre, le sang et le sable chaud.
Située à dix kilomètres au sud de Mexico, la petite localité fortifiée sera le terrain, le 20 août 1847, de la phase finale d’une guerre engagée par les États-Unis pour s’emparer de la Californie. Après la défaite de Contreras, le général Winfield Scott et les forces mexicaines s’y sont repliés dans le couvent de la ville.
Ce document atypique, au-delà d’évoquer une page d’histoire oubliée, s’intéresse à un bataillon renégat du contingent américain : les San Patricios. Constitués d’immigrés irlandais, espagnols et polonais, ils ont rejoint les lignes mexicaines, excédés par les discriminations et les traitements dégradants que leur infligeaient les gradés yankees. Manquant de munitions, dans les rangs mexicains, les officiers Bravos tentent à plusieurs reprises de sortir le drapeau blanc pour signer la reddition. Les San Patricios s’y opposeront, préférant mourir sous les plombs, conscients de risquer la cour martiale pour désertion s’ils se rendent à l’ennemi.
Entraîné au cœur de ce conflit dont il ne maîtrise rien, le jeune Rizzo fait partie de la colonne yankee qui poursuit les dissidents. Fraîchement débarqué sur le Nouveau Monde, ce Sicilien fuyant la misère, s’est engagé motivé par la promesse de la citoyenneté américaine et des terres. Pourtant, viendra le moment où lui aussi devra opter pour un des deux camps. Devant les murs de Churubusco, dernier bastion rebelle, il est temps de choisir sa guerre.
On connaît l’apogée de cet épisode : les États-Unis écraseront, non sans mal, leurs adversaires. L’ouvrage ne fait cependant pas surprise de ce résultat, s’ouvrant sur le massacre des San Patricios avant de revenir sur les événements antérieurs qui ont mené les deux armées à s’affronter à Churubusco. Pour l’auteur, ce développement est prétexte à mettre en exergue la violence et les injustices envers les autres populations sur lesquelles se sont appuyés les États-Unis pour imposer leur puissance.
Pour illustrer son propos, Andrea Ferraris a adopté un trait gras, proche du crayonné, ainsi qu’un dessin en noir et blanc parsemé de quelques planches aux tons sépia. Un plaisir visuel dont le lecteur a tout le loisir de profiter grâce au peu de dialogues nourrissant ces quelques 200 pages.
Simon BAERT
Churubusco
Scénario : Andrea Ferraris
Dessin : Andrea Ferraris
Éditeur : Rackham
200 pages – 20 €
Date de sortie : 12 février 2016