Owen est de retour avec The King Of Whys, un huitième album rempli de comptines pour adultes parmi les plus belles que vous entendrez cette année.
Owen ? Cela ne vous dit rien mais si je vous dis Mike Kinsella et American Football ou encore Joan Of Arc, je vois bien que vous commencez à avoir quelques souvenirs qui vous reviennent à l’esprit. Que ceux qui verront ici une résurgence du Math Rock , un genre qui a fini par lasser à force de se perdre dans ses calculs soient rassurés car avec Owen, le projet personnel et solo de Mike Kinsella on est souvent plus près des accords élégiaques et d’une folk qui n’a pas oublié d’être Pop.
Les dernières nouvelles que l’on avait eues d’Owen nous avait laissé, une fois n’est pas coutume, sur notre faim, le garçon s’essayant à l’exercice un peu éculé et surtout très casse-gueule de l’album de reprises. C’était honnêtement fait, souvent défricheur dans le choix, piochant tant du côté de Lungfish que de Depeche Mode. C’était sympathique mais il lui manquait le petit allant supplémentaire, ce goût de reviens-y. Un disque bien fait mais vite négligé en comparaison des autres productions du monsieur.
Car il y avait du signifiant, du vécu dans ses autres disques et que l’on ne reconnaissait que les références dans ces territoires bien trop balisés.
Empty Bottle en entrée donne une impression fugace et presque mensongère d’une sorte de retour à un Emocore pour l’ancien leader d’American Football. On y croise la lourdeur de Neurosis marie à sa voix diaphane.
The King Of Whys commence réellement avec The Desperate Act où l’on reconnaîtra pour les oreilles les plus affûtées la patte de production de Sean Carey, membre de Bon Iver. A tel point que l’on pourrait se croire immergé dans For Emma Forever Ago. On y trouve des arrangements aériens, la voix nonchalante de Mike Kinsella. On sent le flot de larmes qui a sans doute abouti à la macération de ces 10 titres. A l’écoute de Settled Down, on imagine ce que Michael Stipe apporterait vocalement à ces cassures-là. Car ce qui pêche un peu toujours dans les disques d’Owen c’est l’évidente pauvreté du chant de Mike Kinsella. Heureusement pour lui comme pour nous, il en fait presque un atout de cette voix maigre et famélique pour tirer toute la puissance des effets qu’il pose dans ses arrangements.
Cela le rend plus proche de nous également, le brave gars qui dit ce que l’on vit, nous. Comme Jim Putnam de Radar Brothers ou encore Mark Linkous de Sparklehorse. Prenez Lovers Come and Go. Que deviendrait un tel morceau avec une voix par trop puissante ? Une chose hypertrophié et gonflée à l’hélium ? Ici cela reste la petite chose lyrique qui hésite entre la flamboyance et l’ombre.
Mike Kinsella parvient à faire des petites vignettes comme des odes à la fragilité comme Tourniquet ou A Burning Soul sans pour autant être sans saveur. Un titre comme celui-là ravira aussi bien ceux qui aiment le Mark Kozelek des temps premiers que le Lloyd Cole de Rattlesnakes.
Il peut être tour à tour Folk puis au bord du murmure Jazzy avec Saltwater mais là où Mike Kinsella reste le plus lumineux c’est dans ces mélancolies de bout de chandelle, le parfait An Island et sa guitare slide ou le sublimissime et arrache-cœur Lost.
Peut-être serait-il plus simple d’affirmer que la fin du disque, grosso modo les 4 derniers titres dont Sleep is A Myth nous fait monter très très haut dans la stratosphère avec des comptines pour adultes parmi les plus belles que vous entendrez cette année.
Le paradoxe avec The King of Whys c’est qu’il se commence presque dans la déception pour se clore dans l’adoration. Une cyclothymie qui attise notre imagination et qui ressemble presqu’un peu à nous, à vous.
Greg Bod
Label : Polyvinyl Records
Owen – The King Of Whys
Sortie le : 29 juillet 2016