Inspiré par la vie de son personnage principal, Daniel Vannet, Willy 1er oscille entre réalisme social décalé et vrais moments de tendresse. Une belle surprise.
Willy 1er est un film inspiré de la vie de l’acteur principal, Daniel Vannet, un adulte qui a découvert, après avoir travaillé 20 ans, qu’il était payé à mi-temps alors qu’il faisait un temps plein. La raison ? son illettrisme. Il veut alors apprendre à lire et changer « À Aulnoye j’irai ; un appartement, j’en aurai un ; un scooter, j’en aurai un ; des copains, j’en aurai et je vous emmerde ! ». Cette phrase qu’il a prononcée devient le fil conducteur du film – Caudebec remplaçant Aulnoye – des étapes de l’émancipation de Willy, personnage de cette fiction qui décide de partir de chez ses parents à la mort de son frère jumeau de 50 ans.
Marielle Gautier, Ludovic et Zoran Boukherma et Hugo P. Thomas continuent après leurs courts-métrages de filmer Daniel au plus intime, la solitude, et des solitudes à deux qui se croisent, sans que le film soit creux ou vide, sans ennui. Ils n’hésitent pas à montrer la violence sociale envers ceux qui ne sont pas dans la norme, sans en faire un film glauque ou sombre. La violence des petites villes (scène des boutons au PMU), la violence verbale (homophobie quotidienne avec l’autre Willy, joué par Romain Léger) et la violence physique. Si Daniel Vannet est ce qu’on appelle au cinéma « une tronche », le regard des quatre réalisateurs à son égard est toujours bienveillant, sans apitoiement, ce qui autorise aussi de le filmer violentant sa curatrice Catherine, impeccable Noémie Lvovsky, seule actrice professionnelle du film.
De la violence et cette cruauté, donnant des scènes purement dramatiques, Willy 1er réussit à insuffler une réelle tendresse dans cette épopée vers une intégration sociale, une vie « normale » en résumé. Nul besoin d’aller loin pour trouver un héros ordinaire, sans super pouvoir, si ce n’est son courage et sa persévérance. Et puis, comme dans leurs courts-métrages, les touches d’humour font mouche. Le gag de la photo (que je ne vous dévoile pas) est juste la scène la plus drôle vue cette année en salles. Willy 1er fut donc légitimement présenté en compétition au 5e FIFIGROT (Festival International du FIlm GROlandais de Toulouse) et pour la première fois de sa courte histoire, le jury présidé par Pierre Etaix et le public le couronnèrent chacun d’un prix.
Carine Trenteun
Willy 1er
Film Français de L. Boukherma, Z. Boukherma, M. Gautier et H. P. Thomas
Avec Daniel Vannet, Noémie Lvovsky, Romain Léger…
Genre Comédie dramatique
Durée : 1h 22min
Date de sortie 19 octobre 2016