Alors qu’Okkervil River sort un bel album, Brian S. Cassidy trouve sa propre voie en solo avec Alpine Seas, un disque ombrageux et chaleureux.
De Brian S.Cassidy, on sait peu de choses et pourtant on l’a croisé sur des projets que l’on suit depuis bien longtemps, Shearwater et Okkervil River. Il y faisait figure de second couteau mais comme souvent, dans ces groupes où la démocratie fait office de règle, chacun apporte un bout de lui-même. Le problème, c’est qu’il était dur de deviner qui apportait quoi, de Will Sheff et de ses compagnons d’arme. Avec Alpine Seas, son premier disque solo, Brian S Cassidy se distingue. Si l’on devait le qualifier, on pourrait parler d’aquarelliste ou de pointilliste.
C’est cela, usons d’images picturales pour tenter de définir le travail de l’américain. Prenons par exemple I’m An Ocean, Brian S.Cassidy installe le fond lentement avec sa voix qui reste d’ailleurs tout au long du disque à l’arrière-plan comme pour mieux contraster avec l’ensemble ou peut-être plus prosaïquement par simple pudeur. La musique de l’américain s’installe par couches successives, il rajoute là une pointe de guitare, ici une caisse claire qui s’affirme.
Il y a chez lui cette singularité riche de son économie dans les effets, cette singularité que l’on aime chez Hayden ou encore South San Gabriel ou comment rendre déchirante une guitare slide sur Beyond The Dark. C’est souvent superbe et dur à dater, tant mieux d’ailleurs car on n’a que faire du temps qui passe en musique. D’ailleurs, si l’on doit parler de temps concernant Alpine Seas, on s’empressera de dire qu’on ne le perd pas à l’écoute de A Cruise qui ressemble à s’y méprendre à un inédit d’Iron And Wine.
Quelle intelligence que celle de Brian S.Cassidy que de ne pas seulement nous pondre des ballades arrache-cœur et le reste avec ! Il peut bien plus que seulement cela avec ces mélodies lumineuses digne d’un Arthur Lee avec Arcadia ou Uncompaghre qui ne choisit pas entre Power Pop et Country. Imaginez un concert improvisé dans un Motel entre Nada Surf et Steve Earle.
On ne participe pas à des projets comme Okkervil River ou Shearwater sans en garder quelques traces comme ce Make Believin’ haut en couleurs sixties ou encore ce banjo sur Rich man et la structure alambiquée de l’ensemble. Il a gardé de ses années avec ses amis cette envie de la mise en perspective , ces espoirs de pouvoir faire mieux, cette tendresse qui irrigue tout le disque à l’image de If I could write a song qui évoque Evening hymns.
Alpine Seas est une suite de méandres, d’accidents, de fêlures qui constituent un grand disque habité.
Greg Bod
Brian S. Cassidy – Alpine Seas
Label : Microcultures
Sortie : 4 Novembre 2016