Un gangster en fuite est amené à cohabiter dans une cabane forestière avec un ex-major alcoolique et une vieille lapone tenue pour morte. Glacial et joyeux, un drôle de polar venu du nord.
Lors d’un braquage qui a mal tourné, le complice de Raphael Juntunen s’est retrouvé en prison. Mais alors qu’approche la date de sa libération, le jeune gangster n’a plus envie de partager le butin. C’est dans les forêts de Laponie qu’il va tenter de trouver une planque. Mais c’est sans compter sa rencontre fortuite avec des personnages à l’opposé de lui-même, ce qui va donner lieu à des situations truculentes.
Seuls ceux qui ont lu le roman de l’écrivain finlandais Arto Paasilinna pourront dire si cette adaptation est fidèle, meilleure ou moins bien que l’original. Pour moi qui ne connaissais pas cet auteur, j’ai trouvé cette lecture très plaisante. Nicolas Dumontheuil semble être au moins parvenu à restituer « l’humour doux-amer et burlesque » présent dans les récits de Paasilinna, également caractérisés par « une bonne humeur et une jovialité inhabituelles », selon les informations glanées sur le web. Quant aux personnages, ils sont « singuliers », c’est le moins qu’on puisse dire. Recette éprouvée, la rencontre d’êtres complètement opposés (une vieille Lapone nonagénaire entre autres va cohabiter avec le gangster oisif et le major bourrin) provoque quelques fou-rires contenus, car en effet, on ne rit pas à s’en décrocher les mâchoires tant cela est étrange (et à vrai dire peu crédible), au point d’en être fascinant… mais cela fonctionne, et aux adjectifs mentionnés plus haut, j’ajouterais paradoxalement le charme lié à une certaine candeur qui met un peu d’huile au milieu de ces « grincements ».
Le dessin y est peut-être aussi pour quelque chose. Est-ce ce côté cartoonesque dû à l’aspect des personnages, affublés d’yeux ronds très expressifs ? Est-ce dû à cette ligne claire vaguement hergéenne et ces petits emprunts graphiques au créateur de Tintin et Milou ? A un scénario simple mais parsemé de coups de théâtre cocasses, l’auteur de Qui a tué l’idiot ? accorde parfaitement ses pinceaux. A bien des égards, tant sur la forme que le fond, La Forêt des renards pendus évoque les Racontars de Jorn Riel, écrivain danois dont les écrits ont également été adaptés en bande dessinée, ce qui laisserait penser qu’il existe un humour scandinave, à la fois noir et burlesque…
Voilà donc à l’approche de l’hiver une bonne histoire que l’on pourrait qualifier de « thriller jovial », sans prise de tête, et bénéficiant d’une plaisante atmosphère – forestière et neigeuse –, qui donne envie de la déguster bien au chaud sous la couette… en écoutant Abba bien sûr… Une lecture conseillée et une BD à offrir ce Noël.
Laurent Proudhon
La Forêt des renards pendus
Scénario & dessin : Nicolas Dumontheuil
D’après le roman de Arto Paasilinna
Editeur : Futuropolis
144 pages en bichromie – 21 €
Parution : 25 août 2016