James Franco et Sarah Gadon au générique de cette série adaptée de Stephen King qui pose une question: et si vous aviez le pouvoir de changer un événement historique, le feriez-vous?
Si vous disposiez d’une machine à remonter le temps, quel événement majeur choisiriez-vous de changer ? C’est la question que Jake Epping (James Franco) pose à ses étudiants en classe de littérature. Quel événement majeur voudriez-vous changer ? C’est la proposition de valeur du roman de Stephen King daté de 2011 dont est tirée cette mini série de 2016, en 9 épisodes plutôt bien torchée, parce qu’elle prend le parti de réduire le propos romanesque de Stephen King sans en dénaturer le principe. Actuellement diffusée par Canal+ en France.
Jake Epping a ses habitudes dans un Diner dont il connaît le patron Al, depuis une dizaine d’années. Quand au gré du service celui-ci revient de l’arrière cuisine visiblement plus vieux et amoindri que deux minutes auparavant, il discute avec Al Templeton (Chris Cooper), le patron qui lui révèle son secret. Le Diner est construit sur une faille temporelle. Quand il traverse son placard, il se retrouve propulsé dans la même ville de Lisbon, en 1960. Soit quelques trois années avant l’assassinat de John Fitzerald Kennedy. Chaque fois qu’il traverse son placard, Al inspecte le passé en quête de preuves, de pistes, afin de s’assurer que Lee Harvey Oswald est bien l’assassin du président. Il a dans l’idée d’empêcher le tueur de Dallas d’accomplir sa funeste besogne, persuadé que le monde aurait été un endroit meilleur, sans la guerre du Vietnam, sans la mort du président des droits civiques.
Seulement, lui révèle un Al mourant… Quand on voyage en 1960, on continue bien de vieillir… Même si quand on revient en 2016, pour les gens qu’on a laissé sur place seules deux minutes se sont écoulées. Quand on essaie de changer le passé, le passé se rebiffe et essaie d’empêcher la survenue de sa propre modification. Enfin, si on fait un aller-retour vers le passé, toutes les modifications qu’on a pu faire précédemment sont comme « rebootées » et tout recommence à zéro. Al décède et Jake bien sûr s’en ira en 1960 avec la ferme intention de réaliser le projet de Al Templeton. Sur place il étudie minutieusement le théâtre de l’assassinat futur… Et rencontre Sadie Dunhill (Sarah Gadon) une jeune et jolie bibliothécaire avec qui Jake noue une relation sentimentale. Revenir ? Rester ? Revenir et rebooter ? Influencer la marche du monde ou influer sur le destins des gens de sa future communauté… Voilà autant de questions auxquelles Jake Epping va se retrouver confronté au fil des 9 épisodes de cette mini série qui aux dires du romancier, ne devrait pas avoir de suite.
La série produite par JJ Abrams pour Hulu et diffusée par Canal+ en ce moment est diablement efficace. Elle suit sans le coller le roman de Stephen King que du coup j’ai envie d’explorer ce succès de librairie, tant on sent que le romancier de la description stressante a du se plaire à documenter le passé, les lieux et le style de vie de l’an 1963 ainsi que l’agenda de Lee Harvey Oswald. Autant de subtilités que la série n’a pas, semble-t-il, cherché à retranscrire dans le détail pour éviter les temps morts, sans non plus lui faire apparemment de trop grande infidélités.
Toute l’intelligence de la réalisation tient à cette capacité, comme dans Halt and Catch Fire ou Mad Men, de laisser le spectateur s’imprégner de l’époque décrite par la série. Les chromes des voitures, les relations hommes-femmes, la ségrégation, sont le décor de cette quête héroïque tentant de créer l’uchronie en empêchant la mort de Kennedy. On hésite souvent entre 24 chrono pour cette découpe par dates haletantes, Agent Carter pour les tenues aux bustes généreux, aux cols amidonnés et aux tailles cintrées, ainsi que les bluettes romantiques au long de ces 9 épisodes. Et le pire, c’est que c’est uniquement du mix parfait de ces trois composantes que provient la réussite de la série. A peine pour son côté fantastique distillé par petites doses quasi homéopathiques
On vit au rythme des dates, et de l’heure fatidique de l’assassinat de Dallas, mais ce sont bien le off de la vie de Oswald ou les relations homme / femme à l’aube des années 60 qui nous donnent envie de pousser jusqu’au prochain épisode. Et puis on est vite piqué de l’envie de savoir a quoi va ressembler le futur uchronique parce que comme on est chez Stephen King, même les histoires d’amour cachent une part d’ombre et de fantastique. James Franco, dont je me rappellais seulement pour avoir été un jour le magicien d’OZ, explose en costume à trois boutons et teddy 60’s. A ce point que je lui trouve un faux air de James Dean avec lequel je suis presque sûr qu’il a un peu surjoué la référence.
La série se trouve rapidement un tempo, les acteurs son crédibles, et puis le scénario est d’une efficacité à toute épreuve. Stephen King a tout pensé, pesé, imaginé, dosé l’apport historique, amoureux et fantastique pour cette quête initiatique d’un héros à l’aube de sa trentaine.
L’auteur trouve une habile manière de répondre à la question initiale : « et si vous pouviez changer un événement du passé, pensez-vous vraiment que vous devriez le faire ? » Une vraie réussite , parce que sans prétention ambitieuse. A découvir un week end tranquille la série se « binge watche » tranquille comme on regarderait un Christine ou un Ca… Subtil et sombre à la fois. Actuellement en intégrale chez Canal+ France
Denis Verloes