On avait adoré les premiers disques de Spain, moins les derniers. cette fois Josh Haden nous offre un album Live.
On n’est pas près d’oublier The Blue Moods Of Spain qui, malgré sa tonalité diaphane, a été un grand choc à sa sortie. Depuis, les quelques disques qu’a proposés Josh Haden étaient des objets en demi-teinte, de belles idées ou pas poussées jusqu’au bout ou parfois salopées par l’empressement. Paradoxalement, le magnétisme pour le travail de l’américain restait intact. Après un hiatus de 2001 à 2012, il relance son groupe avec The Soul Of Spain qui retrouvait beaucoup de la grâce des débuts.
C’est sans doute confronté à ses enregistrements Live que l’on peut prendre conscience de l’importance de ses compositions . Posons la scène pour ce Live, Love Song Los Angeles , proposé en prix libre sur le bandcamp du groupe. On imagine bien une petite salle, le Love Song à L.A, un public clairsemé, quelques esprits déjà acquis, une écoute respectueuse et puis sonnent les premiers accords de Ten Nights, on entend cette exclamation dans la salle. On retrouve ce même presque Jazz sépulcral, ce blues sans joie. Cette voix en-dedans.
Et si Josh Haden n’était finalement que le fils de son père, Charlie Haden, la continuité d’un parcours dans les musiques organiques, le Jazz, le blues, ces musiques nègres des tripes, des bas-fonds des États-Unis. Il sera difficile de résister à l’intempérance de The Depression ou à ce Red Line en longueur.
Comme chez Mark Kozelek, il est question de longueur, de patience dans l’installation d’une scène comme ce Every Time I Try construit comme une pièce de Jazz. Les mots n’ont pas tant que cela d’importance chez Josh Haden, ce qui l’intéresse, lui, c’est de jouer sur les climats et les structures au sein d’une composition. C’est ce qui rend d’autant plus passionnant l’exercice du Live car on sent bien que chez lui, l’épreuve de la création passe par un rapport au concert, que de la mémoire d’un concert naissent de nouvelles chansons. On voit ici une gestation, un accouchement sans douleur de belles idées qu’il restera à poser sur un album. Ce qui est sûr, c’est qu’entre les titres incontournables du répertoire que l’on retrouve ici, on repère également de nouvelles pistes qu’empruntera peut-être Spain comme sur From The Dust et ses inflexions à la John Zorn. Si vous avez été un peu déçus par les dernières livraisons de Spain, ce Live pourtant modeste devrait rassurer sur la santé d’un groupe souvent inégal. Et puis pourquoi devrait-on se priver du plaisir d’une enième version de Ray Of Light ?
Une fois encore, on ne serait suffisamment répéter que sûrement un jour prochain, on ne peut encore dire quand, Josh Haden reviendra avec un immense disque qui mettra tout le monde d’accord. Pour l’heure, il vous invite à le suivre dans ses tâtonnements. On ne peut décemment refuser une telle invitation.
Greg Bod
Spain – Love Song Los Angeles
Sortie le 23 février 2017