Jean Dufaux et Jacques Terpant évoquent dans une BD très soignée les derniers mois de la vie de Céline, en 1960 à Meudon, avec le souvenir de ses premiers amours, de ses débuts en littérature et bien sûr de la guerre…
On avait croisé Louis-Ferdinand Destouches (dit Céline) dans la très belle bande dessinée de Christophe Malavoy et des frères Brizzi (La cavale du Dr Destouches) alors qu’il séjournait au château de Sigmaringen avec quelques collabos de sinistre mémoire. On le retrouve ici dans sa maison de Meudon, aux côtés de sa compagne Lucette, en 1960, exerçant toujours sa profession de médecin et terminant le manuscrit de ce qui sera son dernier roman : Rigodon.
Quelques mois avant sa mort, l’homme repense à son passé, à la guerre qui le hante encore, à ses premiers amours avec Élisabeth Craig, à ses débuts en littérature avec son roman Voyage au bout de La Nuit pour lequel il devra se contenter du Renaudot en 1932 alors qu’il semblait favori pour le Goncourt ; avec toujours et encore ce rejet de la société, des médias, des étrangers, des institutions et notamment de la Police qu’il exècre. Une fin de vie peu glorieuse pour cet homme marqué par la guerre 14-18 qui pourra compter jusqu’au bout sur l’a fidélité de son amie Arletty ou de son éditeur Gaston Gallimard.
Dans ce Chien de Dieu – Céline décrit ainsi par Drieu La Rochelle en 1941 – signé Jean Dufaux et Jacques Terpant, on retrouve bien l’image du Céline telle qu’on la connait. Anarchiste et xénophobe mais toujours attaché à son sermon d’Hypocrate et à sa femme. Si le livre propose plusieurs niveaux de récit, c’est pour évoquer quelques périodes clé de l’existence de Céline, abordées comme des allers et retour entre passé et présent. La dureté du personnage, ses idées rances est adoucie, si l’on peut dire, par le dessin doux et réaliste de Jacques Terpant qui rend la lecture très agréable, avec quelques nuances de tons et de couleurs quand il s’agit de se replonger dans le passé de l’écrivain.
Une bande dessinée très belle, très soignée pour se rappeler quel personnage complexe était Céline, avec cette profonde noirceur, son côté sarcastique, son pessimisme, sa haine ou sa peur des étrangers viscérale qui ne le quitteront jamais.
Un écrivain, haï pour ses idées mais aussi admiré pour son style à nul autre pareil et pour la puissance littéraire de quelques romans… qui se retrouve aujourd’hui dans l’actualité par l’intermédiaire des éditions Gallimard qui, après avoir envisagé de publier ses pamphlets antisémites, ont finalement renoncé au projet.
Benoit RICHARD
Le chien de Dieu
Scénario : Jean Dufaux
Dessin : Jacques Terpant
Editeur : Futuropolis
72 pages – 17 euros
Parution : 2 novembre 2017