Il y a 25 piges, les Beastie Boys balançaient un mètre-étalon du « peuh-ra » made in East Coast plein d’humour et rempli d’une énergie dévastatrice. Le Rap des blancs-becs de Brooklyn déferle sur les States dans un style léger et décomplexé entre un Rap conscient et les débuts d’un Gangsta Rap qui va dévorer le genre, et viennent prouver qu’à défaut de savoir sauter, les petits blancs savent quand même rapper.
1994. Le Rap brille de mille feux au firmament de la musique Américaine et déverse sur le monde des litres de samples monumentaux et de flows rageurs. C’est une année mythique pour le Rap.
Une vague noire, trop longtemps contenue dans ces ghettos communautaires, déferle sur les ondes bien proprettes de l’Amérique sauce Father Bush.
Des kilos de » Kaïras » enfouraillées jusqu’aux oreilles sortent de tout les coins. Du métal de partout, de haut en bas, de leurs poches garnies de « guns » brillants et glacés comme la mort, jusqu’à ce sourire métallique et carnassier qui scintille de leur râtelier doré à l’or fin.
Run DMC et Public Enemy quelques années plus tôt avaient montré le chemin, et c’est désormais une hémorragie de talent qui s’écoulent à grands flots, des veines des grandes cités.
Des veines gonflées, des veines gorgées d’un sang épais et bouillonnant que l’on inciserait d’un coup rapide de lame de rasoir et qui éclabousserait d’un rouge indélébile les murs blancs d’une société stupéfaite.
Les talents brimés, les cris de haines, de désespoir, les appels à l’aide ou à la rébellion envahissent les ondes et annoncent à grand coups de bâton la maturité nouvellement acquise du Rap Américain.
En 1992, Rodney King se faisait passer à tabac par quelques flics décérébrés, l’agression est filmée par un amateur et fait le tour des médias.
La terre gronde. Les émeutes enflamment les ghettos Californiens et réveillent la jeunesse noire des bords de ville à coups de baffes dans la gueule.
Deux ans après, la digestion reste difficile et la gueule de bois est profonde.
Mais cet hangover nauséeux laissera des traces indélébiles dans le paysage.
Le gros Notorious B.I.G et son Ready to Die, OutKast avec Southernplayalisticadillacmuzik; NAS et le sublime Illmatic, Gravediggaz et 6 Feet Deep ou Warren G et le smoothie Regulate… G Funk Era entre autres sortiront de ce pavé sanguinolent et graveront leurs noms sur le bitume du bout de leur cran d’arrêt.
Mais au milieu de cette rébellion « Black », de ce mouvement Hip-Hop communautaire, trois New-Yorkais blancs comme des culs lâchent leur quatrième album studio sur les ondes.
A la sortie de Ill Communication, les Beastie Boys sont déjà connus, reconnus et respectés dans le monde du Hip-Hop depuis le succès de leur premier album Licensed to Ill.
Nos anciens Punks débarquent à fond la caisse dans cette année faste pour le Rap Ricain et balancent un son aussi « melting-poté » que leur bonne vieille New-York City.
Ill communication est l’enfant légitime de leur précédent album le très Funky et sautillant Check your head et le monumental Paul’s Boutique véritable laboratoire de recherches de Hip-Hop expérimental.
Les Beastie maîtrisent à merveille leur style.
Ce style inimitable, cette fusion jouissive entre Rock et Rap, ce mélange des genres parfaitement abouti, cette partouze musicale sans capotes où les hypothétiques dangers se transforment en orgasmes à répétition.
Tout y est en bordel, les fluides se mêlent, les styles se fondent et se confondent mais ce Hip-Hop reste d’une pureté sans tâches. Les samples sont léchés et intelligemment mixés, le « flow » démentiel, les lignes d’instrus sont pêchues et carrées. Dave Navarro himself vient même rajouter un peu de couilles à cet album qui n’en manque pourtant pas.
Les petits culs blancs de nos Beastie Boys brillent par leur pâleur dans la légende du Rap Américain et sont devenus un repère majeur dans l’histoire de l « East Coast Rap »
L’énergie épicée et adolescente qui coule de cette galette multicolore comme la sauce blanche de ton kebab, te colle aux doigts et salit tes pompes, mais PUTAIN que c’est bon !
Renaud ZBN
Beastie Boys – Ill Communication est sorti le 31 mai 1994 sur Capitol Records