Le gène musical et l’amour du Velvet se transmet-il de père en fils ? On le dirait bien en écoutant The Goon Sax, groupe du fils du génial Robert Forster…
Parmi les gens de ma génération, nous sommes nombreux à avoir été marqués à vie par le troisième album du Velvet Underground, ses mélodies froissées, ses chansons à l’intimisme bouleversant, ses voix hésitantes… En Australie, les plus beaux « enfants du Velvet » furent peut-être les Go-Betweens, qui ajoutèrent à la formule magique une bonne dose de mélodies pop enchantées… mais ne rencontrèrent malheureusement qu’un succès d’estime et disparurent dans l’indifférence générale.
A l’aube de la troisième décennie du XXIe siècle, reste-t-il encore des petits-enfants du Velvet ? Eh bien, nous ne serons que moyennement surpris de découvrir dans ce rôle de porteurs de flamme (…qu’on ne veut surtout pas voir s’éteindre !) les enfants des Go Betweens : Louis Forster, fils du grand Robert, perpétue au sein de The Goon Sax la tradition paternelle, soutenu vocalement par Riley Jones à la batterie qui évoquera forcément Moe Tucker. Après un premier album (Up To Anything) jugé généralement comme plaisant mais trop artisanal et trop adolescent (les musiciens étaient alors encore lycéens !), We’re not Talking montre un groupe qui a mûri à la dure sous les spotlights d’une célébrité – locale, certes – trop tôt arrivée, et qui hésite à abandonner l’effervescence juvénile, l’insouciance pop, pour entrer sur le territoire de la mélancolie et des incertitudes bien arpenté par les précédentes générations…
A 19 ans passés, le trio de compositeurs / chanteurs Forster, Harrison et Jones, sont sur la bonne voie pour trouver l’équilibre entre le charme de l’imperfection et de l’amateurisme musical, et la nécessité de parler à un public plus large, de partager des émotions plus riches, de raconter des histoires auxquelles nous puissions mieux nous identifier. Une poignée de chansons pop accrocheuses – comme le single She Knows -, prouve le potentiel du trio de Brisbane au-delà du cercle des admirateurs des Go-Betweens ou des nostalgiques du Velvet, et des fanatiques – comme nous – de rythmes métronomiques et de morceaux plus parlés que chantés. Quelques errances dépressives çà et là plombent un peu l’ambiance de ce second album « de transition », mais confirment que Forster & Cie ont l’envie – et la capacité- de dépasser l’insouciance de leur âge.
Reste que Brisbane, c’est bien loin, et que, en attendant un troisième album qui devrait être celui de la confirmation, il ne faudra pas manquer un passage éventuel du groupe dans les salles européennes…
Eric Debarnot