Dès le milieu des 80’s, on voit circuler sur les scènes en marge de Los Angeles une formation de Chicanos patibulaires naviguant férocement entre les styles (Skate Punk, Funk Metal, Punk Hardcore…) avant de devenir les pionniers du Crossover Thrash et ouvrir les vannes du Metal à tout un pan de l’Underground Californien. Les Suicidal Tendencies viennent griffer le Metal au sang en lui injectant en intraveineuse les influences musicales brulantes d’une ville en ébullition. Ils offriront avec ce Light… Camera… Revolution, l’écrin rutilant de ce Speed Metal métissé et surpuissant.
On ne ressort pas indemne de l’écoute de Lights…Camera…Revolution!
C’est une expérience pour tout jeune métalleux.
C’est d’abord tes potes qui t’avertissent.
» Ça envoie sa grand-mère !! » était la première phrase que les heureux veinards ayant pu goûter à la musique des Californiens laissaient échapper, entre un filet de bave tiède et un râle orgasmique.
Pour les vieux cons dans mon genre, ceux qui ont été ado dans les 90’s, la musique ne se trouvait pas partout et à tout moment.
Quand tu crèches en bord de mer, tu trouves plus facilement des épuisettes et des vieux beaux à gourmettes que de la bonne zique aux coins des rues. Il fallait faire tourner sa discothèque entre potes, parce que pour trouver autre chose que Johnny ou même l’aut’ machin de Florent Pagny, fallait monter à la grande ville. Puis prendre le train, s’acheter un disque, ça coûte une blinde pour un boutonneux de quinze ans. Ensuite vient le dilemme : se payer le Rust in Peace de Megadeth ou s’enfumer la tronche pour une semaine.
Pas facile la vie d’ado !!
Enfin le jour bénit arrive. C’est votre tour. C’est vous qui récupérez le CD.
Ce CD au boîtier rayé, comme si James Hetfield y était passé dessus et s’en était servi de gratte sur la tournée mondiale de Master of puppets.
Ce boîtier cassé qui ne tient pas et qui vous reste dans la main quand vous l’ouvrez.
Cette émotion presque aussi intense que la première petite culotte que vous faites glisser d’un geste malhabile, ces mains aussi tremblantes et maladroites que durant votre premier « dégrafage » de soutif’.
Ça y est ! La galette est enfournée ! Ça commence !
You Can’t Bring Me Down.
C’est une baffe dans ta gueule qui ferait passer la main de ton père pour un joyeux paquet de chamallow.
Ta tronche fait un tour sur elle-même, tu es sonné. Tu te demandes si cette première piste n’est pas un mirage, un coup de chance ?
Le temps de reprendre rapidement tes esprits, et Bang ! Lost Again !!
PUTAIN, NON !! C’était pas un PUTAIN de mirage !!
Juste le temps de ramasser tes dents qui ont explosé sur le passage de ces deux premières chansons.
Et là, c’est le tsunami ! Une tornade métallique !!
Alone, Send Me Your Money, Give it Revolution ou bien Lovely, Disco’s Out, Murder’s In.
C’est une avalanche de riffs monumentaux et de solos virtuoses. C’est les doigts magiques et cocaïnés de Mike Clark et Rocky George.
Ce sont des hurlements sauvages à faire flipper n’importe quel loup-garou. C’est Mike Muir et ses cordes vocales en béton armé.
C’est une rythmique carré comme le menton d’Amélie Mauresmo et aussi Funky qu’un Sinclair décidant d’arrêter définitivement la Funk. C’est Robert Trujillo à la basse (qui partira bientôt remplacer Newsted chez Metallica) et R.J. Herrera qui tape comme un sourd sur sa batteuse.
C’est un album mythique des années 90. Un sommet du Métal. Du Speed Métal Chicanos fleurant bon le Tacos de coin de rue et la Colombienne qui colle aux doigts.
Une comète pleine de bruit et de fureur qui s’écraserait dans ta cervelle et laisserait un trou béant, fumant, et incandescent ; que rien ne parviendrai à éteindre.
Renaud ZBN
Suicidal Tendencies – Lights… Camera… Revolution est paru le 3 juillet 1990 sur Epic Records
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