Devant un parterre de fidèles et bénéficiant d’un son impeccable, les Dandy Warhols étaient à Olympia ce 25 janvier 2019 pour un concert en forme d’anniversaire.
Les Dandy Warhols, ce n’est pas rien, c’est presque un culte. D’ailleurs le public des Dandy Warhols est un public plus fidèle, plus passionné que la majorité des spectateurs que l’on rencontre dans les salles de concert. On se retrouve, toujours un peu les mêmes, pour ce que l’on espère toujours être une célébration païenne du Rock’n’Roll sensuel, décadent et drogué. Et têtu… car malgré le manque de gros succès populaire, les Dandy Warhols s’obstinent à creuser le même sillon : ce soir, à l’Olympia, on célèbre les 25 ans du groupe, ce qui ne rajeunit personne, et cet anniversaire-là, on ne peut sérieusement pas le manquer quand on aime le Rock, le vrai, aurais-je envie de dire…
20h : c’est la seconde fois en moins de 3 mois que je peux apprécier Juniore sur scène, après la première partie de Miles Kane à la Cigale : toujours le même mélange léger entre pop sucrée française et garage surf un peu psyché. Disons une version plus élégante, moins punk et trash, sans doute aussi un peu trop sage de La Femme… Swanny à la batterie est toujours aussi fascinante, le guitariste (« la chose ») est toujours aussi masqué, et Anna Jean reste toujours un tantinet trop dans la retenue pour que l’alchimie ne s’accomplisse. On sent parfois que Juniore pourrait monter en puissance, mais rien ne se passe. Plutôt un bon concept, quelques chansons vraiment accrocheuses qui soulèvent un certain enthousiasme dans l’Olympia déjà bien remplie – le concert étant, et ça c’est formidable, sold out ce soir : Juniore est un groupe prometteur. On attend toujours le déclic.
21h10 : un peu de retard pour notre quatuor strange, le public s’impatiente, et puis ils sont là : The Dandy Warhols, toujours les mêmes – même s’il me faut un bon moment pour reconnaître Peter Holmström derrière un rideau de cheveux et sous un chapeau enfoncé jusqu’aux yeux – même si les années commencent à peser sur eux aussi. Courtney Taylor-Taylor a pris un léger embonpoint et ressemble plus aujourd’hui à un (presque) vieux sage indien qu’à une icône gay à la Joe Dalessandro, auquel il faisait penser ; Zia McCabe, toujours rondelette, se dévoile ce soir sous un t-shirt à rayures que Courtney présente ironiquement comme une tenue de marin français (euh, je crois qu’il pense à JP Gaultier !) ; à la batterie, Brent DeBoer n’a plus son imposante coiffure afro et son look seventies, mais reste le batteur charismatique qu’on aimait. Les musiciens sont comme toujours plus ou moins alignés – pas de position de “leader” pour Courtney ! – et bien en retrait par rapport au bord de la scène, une sorte de recul que j’ai toujours trouvé curieux, mais qui finalement traduit bien l’aspect légèrement décalé et délétère de cette musique qui refuse la frontalité pourtant essentielle à l’extase rock’n’rollienne.
Le set commence de manière étonnante, mais vraiment remarquable, avec un titre très mesuré, très construit, où l’électronique mène la danse, mais où la cohésion musicale et la maîtrise technique – eh oui – du groupe impressionne vraiment… Sans doute un extrait du nouvel album – le dixième en vingt-cinq ans, nous dira fièrement Courtney – qui sort officiellement ce jour même, et que personne dans la salle ne connaît donc a priori. Le son est excellent, ce qui est, reconnaissons-le, presque toujours le cas à l’Olympia, et surtout suffisamment fort pour notre plaisir malgré l’application depuis fin 2018 d’une nouvelle réglementation encore plus drastique que la précédente : il est vrai qu’au premier rang, pas très loin de la sono, la position est idéale !
Toute la première partie du set va s’avérer d’une élégance folle, jusqu’à un Get Off magnifique de sensualité et de tension, ce mélange très caractéristique des Dandy Warhols, finalement. On déchante un peu avec High Life, extrait du nouvel album et interprété pour la première fois sur scène, nous dit-on : le chant de Zia peine à convaincre et le mélange musical électro-country qu’on nous propose frôle la faute de goût. On se reprend avec l’incontournable Not If You Were the Last Junkie on Earth (quel titre !), avant que les Dandy Warhols nous refassent le coup de la chanson pop sucrée et pas très belle avec un autre nouveau titre, Small Town Girls : pas sûr qu’on se sente vraiment impatient d’écouter le nouvel album, après ça !
On s’enfonce alors dans le ventre mou du set, et on sent que la tension dans la salle retombe, même si la passion que les gens ressentent pour ce groupe reste tangible… Disons que le concert tourne désormais un peu à vide. Mais qui a déjà vu les Dandy Warhols sur scène ne saurait être inquiet, le groupe ne rate jamais ses finales ! Et à partir de Godless, et bien sûr de Bohemian Like You, le plaisir revient, le public décolle. On lâche sur nous une pluie de gros ballons argentés, histoire de faire “ambiance anniversaire” et tout le monde est heureux. Courtney se décoince un peu pour prendre une photo du public en train de jouer avec les ballons. D’ailleurs même le service d’ordre a été mis à contribution pour les renvoyer lorsqu’ils retombent entre la scène et les crash barriers… Le concert se termine par un medley impeccable, on se doute bien qu’il n’y aura, comme toujours avec les Dandy Warhols, pas de rappel. D’ailleurs Courtney, puis Zia, nous invitent à les rejoindre dans 30-40 minutes à leur DJ set dans une autre salle. Les hommes quittent alors la scène tandis que Zia termine toute seule en nous arrosant de gargouillis électroniques.
25 ans de carrière donc, et les Dandy Warhols restent une expérience singulière, un groupe qui a un charme fou, mais qui quelque part, ne réalise jamais tout-à-fait ses promesses. Presque des beautiful losers, s’ils n’avaient pour eux tout l’amour de leur public.
Textes et photos : Eric Debarnot
Les musiciens de The Dandy Warhols sur scène :
Courtney Taylor-Taylor — chant, guitare
Zia McCabe — clavier, guitare basse
Peter Holmström — guitare
Brent DeBoer — batterie
La setlist du concert de The Dandy Warhols :
Forever (Why You So Crazy – 2019)
STYGGO (Distortland – 2016)
We Used to Be Friends (Welcome to the Monkey House – 2003)
Crack Cocaine Rager (The Black Album – 2004)
Get Off (Thirteen Tales from Urban Bohemia – 2000)
Highlife (Why You So Crazy – 2019)
Not If You Were the Last Junkie on Earth (…The Dandy Warhols Come Down – 1997)
Motor City Steel (Why You So Crazy – 2019)
Small Town Girls (Why You So Crazy – 2019)
Plan A (Welcome to the Monkey House – 2003)
You Were the Last High (Welcome to the Monkey House – 2003)
I Love You (…The Dandy Warhols Come Down – 1997)
Well They’re Gone (This Machine – 2012)
And Then I Dreamt of Yes (Earth to the Dandy Warhols – 2008)
All the Money or the Simple Life Honey (Odditorium or Warlords of Mars – 2005)
Be Alright (Why You So Crazy – 2019)
Godless (Thirteen Tales from Urban Bohemia – 2000)
Bohemian Like You (Thirteen Tales from Urban Bohemia – 2000)
Every Day Should Be a Holiday (…The Dandy Warhols Come Down – 1997)
Pete International Airport (…The Dandy Warhols Come Down – 1997)
Boys Better (…The Dandy Warhols Come Down – 1997)
Zia Outroset
« Zia McCabe, toujours rondelette » Très pertinent.
« Courtney Taylor-Taylor a pris un léger embonpoint » Toujours très pertinent. Il ne faut pas oublier de préciser qu’ils ont des rides maintenant.
« T-shirt à rayures que Courtney présente ironiquement comme une tenue de marin français (euh, je crois qu’il pense à JP Gaultier !) » A l’étranger on présente les rayures type Marinière comme la tenue française typique. Comme le béret.
Mais c’est rien quand tu vois les kilos en trop et les rides qu’on se trimballe nous ! Et ça c’est encore plus pertinent de le dire, non ?
Très pertinent en effet l’analyse des bourrelets de chacun, et du « ventre mou du set », avec Last High, I Love You, et All the Money (génial la trompette)… mouais.
Quand à Forever, Motor City Steel et Be Alright, elles donnent franchement envie d’écouter ce 10e album…
Entre bourrelets et ventres mous, quelqu’un projette ses complexes…
C’est assez amusant, ce genre de reproches – alors qu’on me critiquait souvent pour ne pas parler assez de l’aspect physique et vestimentaire des musiciens. J’assume parfaitement mes complexes, heureusement, mais je préfère lire ces critiques, finalement pas très importantes, comme une preuve sincère de l’amour que les fans des Dandy Warhols portent à leur groupe. Et cet amour, qui n’admet visiblement pas le moindre bémol, est justement ce que je trouve merveilleux avec ce groupe. Keep on rockin’, my friend !