Présents au Festival d’Angoulême, Hubert et Bertrand Gatignol évoquent, lors d’une longue et passionnante interview accordée à Benzine, l’accouchement difficile du Grand Homme, corrélatif au succès grandissant de la série Les Ogres-Dieux.
A les observer, le duo en noir et blanc semble presque sortir d’une des pages des Ogres-Dieux. Dans sa chemise noire, Hubert ressemble à un prince valache, magnétique et ténébreux. Vêtu d’un simple t-shirt blanc sanglé d’une paire de bretelles noires, Gatignol, dégageant une bonhommie légèrement bougonne, a l’air d’un roc, un peu ogre, un peu nounours. Il est celui qui rassure et tempère la fougue romanesque de son compère. Ce code couleur vestimentaire, probablement involontaire, résumerait assez bien l’alchimie qui lie les deux auteurs. Une alchimie parfaitement complémentaire, calquée sur le yin et le yang, l’alliance de la terre granitique et du feu intérieur.
Les deux hommes semblent détendus mais à les entendre, on sent bien que la conception du troisième volet ne s’est pas faite sans mal. Face à la pression du succès, il fallait absolument garder la tête froide, conserver l’esprit originel. En dehors d’un talent incontestable, l’exigence et la ténacité qui caractérisent les auteurs, si épuisantes soient-elles, devraient faire le reste dans la poursuite de leur œuvre au noir. C’est un peu à cela que l’on reconnaît les grands hommes derrière les grandes œuvres.
L’interview vidéo de Hubert et Gatignol :
L’interview retranscrite en intégralité :
Comment a germé l’idée de cette série très originale ?
Hubert : A la base, c’est venu de moi. Il y avait déjà un scénario avant même que l’on se rencontre avec Bertrand. Quand j’étais plus jeune – et j’étais un adolescent de type dépressif – j’ai lu beaucoup de romans gothiques, et donc il y a toute une tradition littéraire qui s’appelle le gothique et commence au XVIIIe avec Le Manuscrit trouvé à Saragosse et les Chants de Maldoror, plus connus, et c’est vraiment un genre qui s’est poursuivi jusqu’à aujourd’hui avec Joyce Carol Oates qui en a écrit un il n’y a pas si longtemps que ça, Bellefleur, une trilogie. Quand je l’ai lu, j’étais terriblement jaloux de J.C. Oates, et je voulais faire mon propre roman gothique. J’ai eu envie de faire quelque chose avec des clashs de taille, des géants. Et puis il est arrivé quelque chose dans ma vie : ma mère est tombée très malade, et comme ça arrive souvent dans ces cas-là, les langues se sont déliées, et j’ai appris des tas de choses sur ma famille, sur ma mère, etc., qui étaient déstabilisantes. D’un seul coup ça expliquait des tas de choses qui me posaient question (j’ai fait deux psychothérapies…) et en fait il fallait chercher dans la vie de ma mère. Et arrive ce moment flippant où on se dit : « Est-ce que finalement je n’ai pas été piloté toute ma vie sans le savoir – alors que je suis plutôt un rebelle entre guillemets – par des histoires que je ne connaissais même pas, par des faits qui remontaient avant ma naissance », et donc finalement je me suis dit : « Est-ce que j’existe en tant qu’individu ? ». D’où effectivement la thématique de la généalogie familiale, comment en tant qu’individu on s’inscrit dans une histoire familiale, dans une histoire sociale, et comment on arrive à vivre malgré ça. C’est-à-dire soit en s’y fondant, soit en s’y opposant. Et c’est toute la thématique centrale des Ogres-Dieux. A partir de là, l’histoire est née et j’ai rencontré Bertrand, qui était dans le même atelier que moi. On s’est rencontré et on a commencé à parler, est venue alors l’idée d’une collaboration sur ce projet.
Alors du coup, qu’est-ce qui a été le plus efficace : la psychothérapie ou la BD ?
Hubert (rieur, après une hésitation) : La psychothérapie m’a clairement sauvé la vie quand j’avais une vingtaine d’années. Écrire, c’est autre chose. C’est une espèce d’exploration de thématiques qui m’intéressent, de zones, de sentiments étranges qui nourrissent un peu l’écriture automatique de l’histoire.
Ce graphisme noir et blanc où domine le noir est assez unique, avec des personnages qui évoquent les mangas. Bertrand, le manga est-il une influence inconsciente ou que tu revendiques ?
Gatignol : C’est un peu ma base culturelle. Et surtout c’est un univers graphique que j’ai mis au point, et cela depuis vingt ans. Mon métier principal, c’est la création graphique dans le dessin animé. J’ai commencé en 2000, comme ça, à créer des dessins animés … c’est un style graphique que j’ai élaboré. Depuis vingt ans, la tête de Petit revient dans tous les dessins animés que j’ai faits. J’ai fait aussi Ironman, et celui-ci revient avec la tête de Petit ou c’est Petit qui a la tête d’Ironman, je ne sais pas… Le manga est une influence qui a été digérée, c’est-à-dire que je n’ai jamais regardé un manga pour m’inspirer, sinon je ne ferais pas des trucs comme ça…
Quelle est la raison du choix du noir et blanc ?
Gatignol : Cela s’est fait assez naturellement étant donné que je travaille en noir et blanc, et les premières recherches se sont faits comme ça. On s’est rendu compte que ça fonctionnait.
Hubert : J’avais aussi fait des tests en couleurs – je suis coloriste par ailleurs – et on s’est rendu compte que ça ne marchait pas. On était un peu embêtés et on se disait : comment est-ce que nos éditrices vont le prendre, et pendant ce temps-là ces dernières se disaient que c’était peut-être mieux en noir et blanc, tout en se demandant si nous, les auteurs, allions accepter. Et finalement on s’est rencontrés et on était tous d’accord…
Je trouve que ce noir donne une force incroyable au récit…
Hubert : Le culot de nos éditrices a été de dire : ça va être en noir et blanc mais on va aussi faire la couverture en noir et blanc avec ce lettrage à l’or, ce qui était un pari audacieux ! Et ça c’est la force de Barbara et Clothilde*, les éditrices de Métamorphose, d’être capables de projeter à partir d’un contenu la forme du livre-objet adéquat, et de créer comme ça une entité graphique et matérielle très forte. Et effectivement quand Petit est arrivé avec ce poids, ce coté grimoire, les gens ont été impressionnés. La matérialité du livre était hyper importante dans l’imaginaire du lecteur.
Les Ogres-Dieux traitent beaucoup de la problématique du pouvoir, mais aussi de la folie qu’elle génère chez les puissants. C’est particulièrement flagrant avec l’évolution de Yori dans le second tome (Demi-Sang). Était-ce pour vous une thématique importante ?
Hubert : C’était une thématique importante. Avec Yori, il y a cette notion de reconnaissance sociale de quelqu’un qui est méprisé mais se nourrit du mépris en disant que plus on le méprise, plus il veut se montrer capable. Et évidemment les relations de pouvoir que l’on retrouve dans une famille – ma mère est quelqu’un de très puissant et on a lutté dans des relations très complexes. Par ailleurs j’ai l’impression d’avoir été biberonné à la politique d’une certaine façon depuis que je suis tout petit, alors qu’en fait ce n’est pas du tout un problème politique… Par la suite j’ai participé à la vie politique en étant syndicaliste, j’ai participé aux négociations sur le code de la propriété intellectuelle jusqu’à il y a cinq ans… Tous ces enjeux de politique sont des choses que j’ai expérimentées autour d’une table de négociations… A travers Yori, l’idée à faire passer était que la douleur et la souffrance n’anoblissent pas les gens, ça ne les rend pas meilleurs, malgré la fameuse thèse judéo-chrétienne…et malheureusement en général, le malheur produit des gens abominables.
J’ai noté une phrase qui résonne étrangement avec l’actualité dans ce tome 3, lorsque Lours explique les raisons pour lesquels il est lutte contre le pouvoir : « On se bat pour tout un pays. Parfois, j’ai l’impression que les gens s’en foutent. Ils restent là, l’œil vide, pendant qu’on les exhorte à résister… »
Hubert : Bien sûr… c’est involontaire parce que ça a été écrit bien avant, mais c’était aussi mon sentiment à l’époque des luttes syndicales, où l’on n’était qu’une vingtaine à se battre pour toute une profession et on avait souvent le sentiment d’être un petit peu seuls…Quand on ne se bat pas pour le pouvoir, c’est quelque chose qu’on peut sentir assez facilement.
Pour sa part, Lours montre bien qu’il est un battant quand il dit : « Et le lendemain, je me lève avec une nouvelle idée, un nouveau projet et l’envie d’en découdre encore. »
Hubert : C’est l’essence de Lours en fait. C’est quelqu’un qui s’en prend plein la gueule, qui finit à terre, brisé, mais qui se relèvera toujours, car il est incapable de lâcher. Et j’ai un côté entier comme ça… J’étais très en empathie avec ce personnage, car ce tome 3 a nécessité quatorze versions et un an et demi d’écriture, et donc à chaque fois il fallait toujours se motiver et repartir malgré les phases d’abattement récurrentes, aller jusqu’au bout de la fatigue. Mais je suis tellement une espèce de Breton obstiné capable de taper dans le mur jusqu’à ce qu’il s’écroule… Et ça, c’est le personnage de Lours.
[SPOILER]
Dans le troisième volet, vous abordez la thématique des relations père-fils à travers Lours. Comment expliquer la fin où ce dernier, juste après avoir obtenu la reconnaissance tant attendue du père, l’assassine de façon impulsive, puis périt aussitôt sous l’attaque de son frère ?
Hubert : Pour moi justement, cette dernière scène est une scène d’amour en fait. C’est l’amour d’un fils pour son père, c’est une forme d’euthanasie. Lours au prix de sa vie accède à la demande de son père qui lui dit qu’il veut mourir. Alors on ne sait pas vraiment si ça se passe dans la réalité ou dans ses fantasmes… Mais enfin, il est en paix avec lui-même. Il est allé jusqu’au bout de lui-même, jusqu’au bout de son chemin. Et finalement il trouve, dans cette défaite finale, le moyen de gagner (parce que c’est Lours) et de permettre d’une certaine façon à Petit d’accoucher de lui-même. Cette scène a été très complexe avec des double-sens…
[FIN DU SPOILER]
Et la scène finale est très spectaculaire avec une mise en images très audacieuse. La forêt aussi est très inquiétante…
Gatignol : C’est bien si vous le pensez, parce que moi, je ne la trouve pas assez inquiétante.
Mais le noir fonctionne très bien ! On n’a jamais vu la forêt comme ça…
Gatignol : L’idée c’était que la forêt colle, qu’elle soit inextricable, et d’une certaine manière c’était la même logique que dans Petit. C‘est-à-dire que pour Petit, j’avais imaginé l’album comme étant digéré par son environnement. Je voulais quelque chose de vivant comme s’il était dans un boyau permanent, dans une digestion continue. Là c’est un peu pareil, c’est comme si on était dans la bouche d’un monstre en fait, avec des lianes qui tombent… et là il s’agit d’une forêt de séquoias géants où normalement rien ne tombe…
Hubert : ce n’est pas la forêt primaire, c’est la forêt primale !
J’ai pu voir les trois tomes sortis en coffret et je me suis posé la question : Le Grand Homme serait-il le dernier volet ?
Gatignol : Non, ce n’est pas le dernier, c’est juste un tome parmi d’autres ! Le coffret est plus une introduction, une piqûre de rappel destinée à ceux qui ont loupé les deux premiers, une sorte de kit de démarrage…
Hubert : C’était une occasion de remettre en avant la série, en fait, et comme deux ans et demi s’étaient écoulés entre le tome 2 et le tome 3…
Gatignol : Et si on arrive au bout d’un cycle complet, dont on ne connaît pas encore la taille, il y aura certainement un coffret définitif, qui sera pour nous un truc costaud ! Et même pourquoi pas, un seul et même volume ! (rires)
Hubert : En fait c’est un truc qui se construit. A la base j’avais rêvé d’une trilogie mais je n’ai pas réussi. Avec Bertrand on s’est dit qu’il valait mieux faire un bon bouquin qu’une mauvaise fin de trilogie. Du coup cela a réouvert le jeu, forcément. Et j’ai eu d’autres envies qui sont venues pendant l’écriture.
Il y aura donc une suite ?
Hubert : On n’est pas dans l’idée d’une suite. On est plutôt dans l’idée d’un univers contenant des portraits, qui à chaque fois donnent un point de vue à un moment particulier.
Gatignol : Il est certain que l’addition de tous ces portraits créé une forme de série. Mais la prérogative originelle était de faire des bonnes histoires. Et donc s’il faut couper et décrire une situation cinq cent ans avant ou cinq cent ans après pour exprimer une bonne idée par rapport à cet univers-là, c’est ce qui va se faire. Si on doit changer de pays, on le fera…
Hubert : Rien n’est écrit mais nous avons des pistes. On construit le projet tout en avançant, on discute, on lance des idées…
Il s’agit vraiment d’un travail collaboratif…
Gatignol : Le travail se fait sur l’impulsion d’Hubert et sur un rebond de moi…En quelque sorte je suis le mur…
Hubert : …et je teste mes idées sur lui !
Gatignol : Hubert va lancer une balle et voir comment ça rebondit. En ce qui me concerne, j’émets des idées qui vont être des idées de vision générale sur ce qui pourrait être intéressant, mais il n’y a pas de réelles propositions scénaristiques de ma part, je ne vais pas suggérer de raconter l’histoire de tel ou tel personnage. Je dis simplement : voilà, on a tels ingrédients, est-ce qu’il ne serait pas intéressant d’aller dans telle direction ?…
Vous avez donc trouvé la parfaite alchimie pour travailler en duo ?
Hubert : C’est une alchimie complexe qui n’est pas évidente…
Gatignol : C’est très épuisant et très exigeant… Sur le tome 4, on discute encore sur la manière de procéder mais parce qu’en réalité ce qu’on est sûr de préserver, c’est cette alchimie-là… et justement, le piège, vu que cela marche plutôt bien, serait de nous mettre une pression de malade sans nous laisser le droit à l’erreur. On s’est affranchis très volontairement de ça et c’est ce qui fait qu’on a réussi à proposer des choses fortes, mais on est aussi conscients que dans un cadre global, on ne peut pas faire n’importe quoi
Hubert : Ce qui est intéressant, c’est que quand le tome 2 a été annoncé comme n’étant pas une suite, les gens ont d’abord protesté et puis quand Demi-Sang est paru, les réactions ont été enthousiastes… Finalement, cela a créé une excitation et on nous demandait : « Vous allez où après ? ». Et moi en tant que scénariste, cela m’amuse beaucoup plus de me dire, je vais déplacer, faire un pas de côté… C’est quelque chose qui est très propre au roman gothique. Par nature, un roman gothique n’est par linéaire mais déstructuré, baroque, ça peut partir partout…
Gatignol : Ce qui a marché, c’est qu’on a été très intransigeants dès le début, et on n’a jamais essayé de mentir ni de vendre autre chose. Au début, il peut y avoir quelque chose de déstabilisant. Par exemple, certains critiques ou libraires pourtant plutôt pointus nous reprochaient d’avoir un peu bâclé l’arc narratif de Petit, ce qui est triste pour eux car apparemment ils sont passés à côté, alors que c’était plutôt bien perçu par l’ensemble des lecteurs qui ont finalement compris qu’ils n’étaient pas dans une série classique, mais une sorte de mosaïque censée constituer un portrait. Ce qui est sûr, c’est qu’on restera intransigeants sur la qualité de l’histoire. On préfère ne rien proposer plutôt qu’une histoire médiocre.
Hubert : A un moment du projet, il faut toujours qu’il y ait une incandescence, et si l’incandescence n’est pas là, ça veut dire que ce n’est pas allumé. Je sens moi-même si c’est un peu trop mécanique et s’il n’y a pas encore le cœur. Tant que le cœur n’est pas là, avec ce truc qui vient des tripes, ça ne va pas. Et c’est complexe d’aller à cet endroit-là. Par chance, j’y ai été très facilement deux fois au début, mais il a fallu creuser très profond pour y arriver sur le troisième tome. Et en ce moment, je sens où est le cœur, j’ai cru l’avoir touché mais il n’est pas encore au centre de l’histoire.
Gatignol : Mon rôle, étant donné que je n’ai pas cette pression-là, la mienne étant plutôt mécanique en tant que « réalisateur », est de prendre un matériau déjà existant et de lui donner sa meilleure expression. La pression qui s’exerce sur Hubert n’est pas la même. Elle consiste à faire sortir quelque chose du néant. De mon côté, je rebondis sur ce que m’envoie Hubert, et c’est beaucoup plus confortable pour moi. Mon rôle dans notre binôme est d’avoir un regard plus détaché par rapport aux choses, et c’est pour ça que j’insiste là-dessus. Pour le tome 4, il faudra qu’on se dégage de ce poids qu’on s’est créé nous-mêmes, pour « repartir à zéro » sur des bases qui vont être plus « apaisées ». Alors qu’on ne pouvait pas se permettre ça sur le tome 3, je suis bien d’accord.
En tout cas, on sent bien la passion qui vous anime tous les deux… Et de la part des Editions Soleil, vous bénéficiez d’une grande liberté j’imagine…
Gatignol : Nous sommes aux manettes depuis le début…
Hubert : On est deux auteurs confirmés qui sont arrivés dans une collection…
Gatignol : Plus pour toi, pas pour moi…
Hubert : Plus pour moi effectivement… avant que j’arrive il y avait peu de scénaristes un peu confirmés chez Soleil, notamment à Métamorphose, et c’est vrai qu’avec ce que j’avais écrit avant, j’avais quand même une certaine liberté. Je savais ce que je voulais faire et on devait me faire confiance.
Combien de tomes y aura-t-il au final ?
Gatignol : On ne sait pas réellement… on sait seulement où l’histoire s’arrête, et la direction qu’elle doit prendre.
La série marche suffisamment pour vous permettre de continuer ?
Gatignol : Heureusement oui, et c’est pour ça que la question sur le tome 4 est extrêmement importante, parce que le paradigme a changé. A la base on était challengers, et maintenant on vend suffisamment d’albums pour pouvoir en vivre un minimum.
Hubert : En ce sens, ce tome 3 était déterminant…car si les ventes ne suivent pas, on ne peut pas continuer.
Gatignol : Paradoxalement vu que ça fonctionne bien, c’est le moment de respirer un petit peu pour être sûr de continuer à voyager loin… et donc il y a un questionnement sur la méthodologie de travail, comment est-ce qu’on fait pour continuer tout en se préservant…et en terme de fond, la vigilance ne sera jamais relâchée.
J’espère en tout cas que vous allez nous emmener loin et continuer à nous surprendre ! Merci messieurs !
*Barbara Canepa et Clotilde Vu
Propos recueillis à Paris le 26 janvier 2019 à Angoulême par Laurent Proudhon