Le quatrième album de Local Natives, “Violet Street” vient juste de sortir, et le Point Ephémère affichait complet jeudi soir pour le retour à Paris d’un groupe qui s’est un peu assagi.
Cela paraît déjà loin, mais l’apparition de Local Natives en 2010 comme fer de lance du rock Indie de Los Angeles avait fait un certain bruit, et cette musique étrange, combinant rythmes – peut-être un peu hâtivement qualifiés de – Afro-beat, guitares sautillantes et harmonies vocales suaves, sans oublier des paroles qui saisissaient plutôt bien l’air du temps, s’était clairement distinguée du lot. Et ce d’autant plus que, scéniquement, le groupe faisait preuve d’une énergie peu commune. Près de dix ans ont passé, et l’excitation de la découverte n’est plus là, tandis que le groupe – logiquement – mûrissait et que sa musique s’épanouissait et se calmait en même temps. Un nouvel album, Violet Street vient juste de sortir, et malgré le peu de buzz fait autour, le Point Ephémère affiche complet ce soir pour le retour à Paris de nos ex-enfants terribles du SoCal indie, aujourd’hui sympathiques trentenaire barbus…
21h00 : C’est un public très calme et civilisé ce soir au Point Ephémère qui attend patiemment l’apparition de Local Natives, l’absence d’une première partie rendant quand même le temps long… La disposition du matériel sur la scène, exploitant au mieux l’espace profond du Point Ephémère, les lumières excellentes et le son parfait, trahissent un professionnalisme manquant souvent aux formations plus débutantes jouant en ce lieu, et font que nous allons pouvoir assister à un beau concert dans des conditions optimales. Le groupe attaque par le premier single extrait du nouvel album, Café Amarillo, et la dynamique de la soirée est immédiatement posée : des harmonies vocales sophistiquées et parfaitement assurées (pour simplifier, on louche un peu vers Fleet Foxes…), une texture sonore à la fois raffinée et déchirée quand il le faut par des éclats tranchants de guitare, et surtout des rythmiques ébouriffantes : même sur les morceaux les plus calmes, la batterie de l’extraordinaire Matt Frazier nous offre un voyage gratuit vers des contrées exotiques, et ajoute un incroyable aspect dansant et joyeux à la musique de Local Natives.
Au premier rang, juste devant nous, le sympathique Taylor Rice brille régulièrement à la guitare, et lance sur la plupart des morceaux le signal de la danse, voire de la transe, avec ses sursauts d’excitation. Il est aussi ce soir le porte-parole du groupe, parlant autant qu’il le peut en français, et exprimant – avec une sincérité toute américaine, c’est-à-dire où l’on ne peut guère séparer l’enthousiasme réel du professionnalisme efficace – sa joie d’être avec nous pour la “Release Party” de l’album. A sa gauche, le second chanteur, Kelcey Ayer, retranché derrière ses claviers et ses percussions – qu’il quittera deux fois pendant le set lorsque les musiciens échangeront leurs instruments, une pratique que j’ai toujours trouvé bien sympathique –, est un peu plus en retrait, mais on peut imaginer qu’il s’agit surtout là de son embarras de ne pas parler français (ce sera assez drôle d’ailleurs quand il annoncera que le groupe repassera en septembre à la Maroquinerie, un mot clairement imprononçable pour lui !). A la droite de Taylor, Ryan Hahn contribue brillamment aux harmonies vocales et complète avec sa guitare les riffs de Taylor, troisième homme indispensable à l’architecture sonore du groupe.
Dès le second titre, You & I, extrait du second album, le principe de la setlist de ce soir est clair : pas de concentration unique sur le nouveau disque, mais un mélange de bon ton entre toutes les périodes du groupe, pour faire plaisir à tout le monde. Car s’il y a un mot qui définit bien la soirée, c’est celui-là, le PLAISIR. Ne manque à mon goût qu’une touche de folie, qui aurait pu faire décoller le concert vers quelque chose d’un peu plus extraordinaire. Il faudra attendre Sun Hands, tiré du tout premier album, pour que quelque chose de vraiment formidable se passe, et que le groupe retrouve pendant quelques minutes sa singulière énergie des débuts : c’est très, très beau, et on aimerait évidemment tout un set à ce niveau-là.
Dernière ligne droite, avec les chansons les plus accrocheuses et les plus populaires du songbook de Local Natives, et un rappel d’un seul titre, un peu radin, pour un concert qui ne dépassera malheureusement pas les une heure vingt.
Tout le monde sort de la soirée ravi, rien à dire, Local Natives reste un groupe passionnant, même si un peu plus de prise de risques, ou même d’abandon, serait clairement un plus ! Une impression à confirmer ou à infirmer à la Maro en septembre !
Texte et photos : Eric Debarnot
Les musiciens de Local Natives sur scène :
Taylor Rice – vocals, guitar
Kelcey Ayer – vocals, keyboards, percussion, guitar
Ryan Hahn – guitar, bass, vocals
Matt Frazier – drums
Nik Ewing – bass, keyboards, vocals
La setlist du concert de Local Natives :
Café Amarillo (Violet Street – 2019)
You & I (Hummingbird – 2013)
When Am I Gonna Lose You (Violet Street – 2019)
Ceilings (Hummingbird – 2013)
Dark Days (Sunlit Youth – 2016)
I Saw You Close Your Eyes (single – 2017)
Coins (Sunlit Youth – 2016)
Megaton Mile (Violet Street – 2019)
Mt. Washington (Hummingbird – 2013)
Garden of Elysian (Violet Street – 2019)
Breakers (Hummingbird – 2013)
Sun Hands (Gorilla Manor – 2009)
Heavy Feet (Hummingbird – 2013)
Who Knows, Who Cares (Gorilla Manor – 2009)
Tap Dancer (Violet Street – 2019)
Encore:
Wide Eyes (Gorilla Manor – 2009)